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Impression : le coût stratégique de la copie

Avec leurs systèmes multifonctions et leurs services de facturation à la page, les constructeurs d’imprimantes et de copieurs se disputent le rôle de concentrateur des ressources d’impression au sein de l’entreprise.

A l’instar des systèmes de stockage ou de traitement, les ressources d’impression gagnent à être concentrées en un nombre restreint de machines. A la clé, une maîtrise des coûts au niveau départemental, favorisant, à terme, leur réduction. Dans cette optique, les offres ” multifonctions ” des principaux acteurs de l’impression départementale s’adaptent aux besoins des entreprises. Ainsi Lexmark, HP et, tout récemment, IBM élèvent-ils désormais ces systèmes au rang de pièces maîtresses de leurs stratégies, après un démarrage plutôt difficile et sur fond de concurrence avec les fournisseurs de copieurs, eux-mêmes multifonctions.La lutte entre copieurs numériques départementaux et imprimantes ?” de quinze à quarante pages par minute pour une trentaine d’utilisateurs ?” ne date pas d’hier. Dès 1997, il était déjà question de copieurs connectables au réseau de l’entreprise. Même si, sur le terrain, ces derniers restaient cantonnés à la copie. Aujourd’hui, la donne change. Une étude réalisée par le cabinet Gartner sur le premier trimestre de 2002 montre que les copieurs numériques représentent désormais les deux tiers des ventes de copieurs. Et, pour la première fois, près de un copieur numérique sur deux s’est vendu directement connecté au réseau de l’entreprise ?” l’autre moitié pouvant, bien sûr, être connectée ultérieurement. La présence de ces machines dans les entreprises risque, inévitablement, de limiter la prolifération des petites imprimantes placées dans un périmètre proche de l’utilisateur.

Le coût à la page passe au premier plan

HP, Lexmark ou IBM tablent donc sur leurs récentes imprimantes multifonctions pour centraliser une partie des éditions, en s’appuyant sur le même modèle que les fabricants de copieurs. Ces derniers disposent toutefois de deux atouts de taille : une forte présence au sein des entreprises et une expérience de longue date en ce qui concerne la facturation à la page. Une expérience qui, avec la mutation des processus d’achat dans les entreprises, devient particulièrement précieuse.En effet, seuls 38 % des acheteurs de systèmes d’impression en connaissent le coût à la page. Les directions informatiques n’ont, en général, qu’une idée approximative du prix global engendré par l’acquisition de la machine, les consommables, le papier, les pannes et toutes les opérations de maintenance. Réduction des budgets oblige, les entreprises ont pris conscience de cette faille et cherchent désormais à chiffrer les dépenses liées à l’impression : “Aujourd’hui, c’est toute l’entreprise qui se rassemble pour penser l’impression, explique Anne Robin, PDG du cabinet d’études Infraforce. En 2001, 60 % des deux cent soixante-sept mille établissements que nous avons contactés ont vu l’acheteur d’imprimantes (issu du service informatique) et celui des copieurs (issu des services généraux) coopérer lors de l’acquisition de nouveaux systèmes d’impression.” Cette collaboration ne concernait que 40 % Suite page 28 des entreprises un an auparavant. Même son de cloche au Gartner : “D’après nos sondages, c’est de plus en plus souvent une personne des finances qui est chargée d’acheter à la fois copieurs et imprimantes”, explique Sharon McNee, consultante. Or, les services généraux, habitués à traiter avec les fabricants de copieurs, ont toujours été sensibilisés au coût à la page. “Ce mode de facturation ?” aujourd’hui le plus adapté ?” garantit une totale visibilité sur l’ensemble des coûts”, poursuit-elle.Dans ces conditions, les constructeurs d’imprimantes cherchent, à leur tour, à séduire les services généraux en adoptant les mêmes méthodes que leurs concurrents des copieurs. Leurs offres de systèmes multifonctions, centralisant les éditions ?” fax, impressions, copies ?” à l’échelle départementale, facilitent la mise en place d’un système de facturation à la page. HP, avec son programme Print Advantage, cherche surtout à convaincre les services généraux et propose une extension du service de facturation à la copie du multifonction aux simples imprimantes laser. Lexmark, pour sa part, cherche davantage à convaincre ses clients existants ?” les services informatiques ?” de se doter de systèmes multifonctions. En amont de ces propositions, tous deux ont renforcé leurs offres de services d’audit de parc.

Des offres packagées difficiles à vendre

Il reste tout de même aux constructeurs d’imprimantes à assurer chez leurs clients une présence qui soit aussi soutenue que celle des vendeurs de copieurs. Une présence doublement précieuse, puisqu’elle servirait non seulement à assurer un service de qualité, mais aussi à renouveler le parc le moment venu. “Les constructeurs d’imprimantes ont profité de la multiplication des postes de travail pour distribuer leurs machines comme de simples boîtes, précise Anne Robin. Mais ils n’ont jamais été prospectifs.” Et ce contrairement à des Canon, Xerox ou Ricoh. “La base installée est beaucoup plus solide chez les fabricants de copieurs, reconnaît-on chez Lexmark. Du fait de leur présence constante dans les entreprises, ils sont presque assurés de renouveler la totalité de leurs machines.” Confirmation du Gartner : “Les revendeurs de copieurs travaillent depuis des années avec leurs clients autour de ces offres financières. Ils ont, à la longue, développé des relations personnelles avec eux”, explique Sharon McNee. La difficulté rencontrée par les fabricants d’imprimantes porte aussi sur le service. Car ni eux ni leurs revendeurs n’ont, en la matière, une culture aussi poussée que les fabricants de copieurs. Cela vaut en particulier pour ce qui est de la maintenance des multifonctions dans les petites entreprises. Il s’agira, par exemple, d’intervenir en quelques heures seulement en cas de panne. Pour ce faire, les constructeurs commencent à former leur revendeurs et à nouer des partenariats de tierce maintenance. Mais ce bouleversement de culture ne va pas sans heurts. Chez Lexmark, qui ne réalise que 30 % de son chiffre dans les petites entreprises, on déplore ainsi que “les petits revendeurs connaissent des difficultés pour vendre [nos] offres de maintenance et de facturation à la page”.Coté revendeurs, ces offres laissent dubitatif : “Les programmes de facturation à la copie des constructeurs d’imprimantes sont difficilement vendables. Proposer un prix à la page nécessite des calculs complexes. En revanche, dans le domaine des copieurs, les programmes tournent depuis des années. Ils sont totalement rodés”, explique Yannick Deforge, directeur commercial Sud-Est pour Euraliance, revendeur de matériel Canon, HP et Lexmark. “HP est, par exemple, très fort pour vendre ses imprimantes. Mais il n’a pas encore la culture des offres packagées”, poursuit-il. Il ne sera pas facile aux fabricants d’imprimantes de convaincre leurs revendeurs. D’autant que certains, en déléguant la maintenance à un tiers, ne leur offrent qu’une faible marge de man?”uvre.Du point de vue de la pertinence de l’offre pour les entreprises, les fabricants de copieurs ont donc une longueur d’avance sur leurs collègues des imprimantes. Mais pas si importante que cela. Eux aussi sont dans l’obligation de modifier la nature de leurs services. Car la connexion au réseau ne fait pas tout. Il leur faut maintenant prouver que leur maîtrise de l’informatique est comparable à celle des fabricants d’imprimantes. Leur offre de services s’étend donc désormais de la connexion du copieur multifonction au réseau (un prérequis) à la gestion des processus documentaires (au travers de partenariats avec les éditeurs de logiciels de gestion documentaire), en passant par la formation dispensée aux utilisateurs.Toujours est-il que les copieurs sont aujourd’hui plus à même de répondre à une problématique de maîtrise des coûts. Quant au succès des imprimantes multifonctions, il dépendra de la capacité des constructeurs à modifier leurs habitudes de vente.

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Vincent Berdot