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Free Mobile : Xavier Niel répond aux attaques à l’Assemblée

Offensif, Xavier Niel, patron d’Iliad, a défendu son modèle économique à l’Assemblée nationale et répond aux critiques de ses concurrents, avec la verve qu’on lui connaît. Verbatim.

Il ne faut pas embêter Xavier Niel. Qui a été très offensif mercredi 25 janvier 2012, alors qu’il était invité par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale à parler de Free Mobile. Il faut dire que le « petit nouveau » de la téléphonie mobile a été largement critiqué depuis son lancement… Notamment par ses concurrents qui, on dirait, ont eu un peu peur de cette nouvelle offre.

Fidèle à lui-même, Xavier Niel se défend comme un beau diable devant les députés : « Comment fait-on pour discréditer le petit nouveau ? On invente des choses… On dit qu’il n’y a pas d’antennes… On dit qu’il y a une Freebox connectée à votre antenne… on va inventer des choses parce qu’on a rien de factuel. Parce qu’on ne peut pas dire aux Français qu’on a fait des bêtises et qu’on a profité de certaines rentes de situation. » Le ton est donné. Voici les principales sorties du patron de Free.

– L’emploi
Les syndicats d’Orange, SFR et Bouygues se sont inquiétés de l’arrivée de Free Mobile et ont fait part de leurs craintes d’une perte de quelque 10 000 emplois. Allant jusqu’à se demander si Xavier Niel ne prenait pas « les Français pour des c… ».

Réponse :
« Aujourd’hui nous avons plus de 5 000 salariés dont 4 000 en France […] pour 2,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Je vais vous faire un comparatif factuel. Bouygues Telecom : 5,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 9 200 salariés. Un salarié d’Iliad produit 431 000 euros de chiffre d’affaires, contre 612 000 pour un salarié de Bouygues Telecom. Si Bouygues Telecom avait autant de salariés qu’Iliad en proportion, il devrait employer 4 000 personnes supplémentaires. »

– Une entreprise low cost ?
Free est-il moins cher parce qu’il propose de moins bons services ? Voilà la thèse qu’ont largement développée ses concurrents. Low cost peut-être, mais seulement au niveau des salaires, selon Xavier Niel.

Réponse :
« J’entends souvent que Free est une entreprise low cost. Non. On a des offres à bas prix parce les télécoms sont une dépense contrainte et comme cette dépense s’impose à chacun d’entre nous, il doit y avoir des prix bas. Mais on est tout sauf une entreprise low cost ! On est une entreprise raisonnable : mon salaire est 20 ou 30 fois inférieur à celui de mes concurrents [soit 173 000 euros annuels, dixit Xavier Niel, NDLR]. C’est le cas pour tous les dirigeants d’Iliad. Et on a un mode de fonctionnement différent. » 

– Le réseau et les antennes
Quelques jours après le lancement de Free Mobile, Iliad se voit accusé de mensonge : son réseau ne serait même pas lancé et le nombre d’antennes placées par Free serait largement insuffisant. Xavier Niel réplique avec vigueur, notamment concernant la situation sur Paris, où Free serait bloqué par ses concurrents. Et insiste sur le fait que le déploiement de son réseau propre est une priorité… Notamment pour gagner de l’argent.

Réponse :
« L’Arcep a constaté que notre réseau couvrait plus de 27 % de la population et depuis on a continué de poser des antennes. Il n’y a qu’une chose qui marche dans les télécoms, c’est d’avoir son propre réseau. Regardez dans l’ADSL : quand la compétition est devenue plus tendue, les opérateurs qui n’avaient pas de réseau ont disparu. […] On pense que le seul moyen d’exister et de nous différencier, c’est de déployer notre réseau en propre. A côté de ça, nous avons signé un accord commercial, de type MVNO avec Orange, comme Virgin Mobile ou d’autres. Cela nous permet d’avoir une couverture quasi-totale. Cette location, c’est fantastique, mais ce n’est pas un modèle viable, il faut déployer un réseau. »

– La situation à Paris

Réponse :
« C’est vrai que dans Paris intramuros on a très peu d’antennes, parce que les procédures y sont extrêmement longues et que nous pensons – mais nous sommes parfois paranoïaques – que nos petits camarades ont inventé des choses pour que Paris ne délivre plus de nouvelles antennes, ainsi on reste dans un statu quo qui leur sert. […] Notre objectif est d’arriver le plus vite possible à une couverture significativement supérieure à 90 % de la population car c’est à ce moment-là que nous gagnerons de l’argent. […] On a lancé des commandes pour plus de 5 000 antennes et nous disposons de plus de 1 000 antennes actives.

– La relation avec Orange… et les autres.
Orange, partenaire commercial de Free, n’est pas logé à la même enseigne que Bouygues et SFR qui doivent tout changer à ses yeux.

Réponse :
« France Télécom est légitime pour avoir des prix un peu supérieurs parce qu’un certain nombre de Français ont besoin d’une réassurance : ils trouvent auprès de Free de l’innovation à bon marché et auprès d’Orange de la réassurance. En revanche, les autres doivent réinventer leur modèle qui consiste pour l’instant à singer celui de l’opérateur historique. »

– La 4G et les débits
Free n’a pas été sélectionné
pour une licence supplémentaire pour la 4G. Mais l’opérateur dispose déjà d’une licence dans la bande des 2,6 GHz. Ce qui, selon Xavier Niel, suffit pour jouer dans la « première division » des réseaux mobiles de demain.

Réponse :
« Nous pensons que la data est la chose la plus importante. On dispose déjà du spectre 3G en 900 MHz. Parallèlement à ça, nous avons obtenu le spectre 4G le plus important : nous pensons que la 4G est faite pour densifier, amener beaucoup de débit. Orange et nous-mêmes avons obtenu 20 MHz de spectre contigu, c’était le seul qui nous intéressait : nous voulions les fréquences les plus larges possibles car ce que les Français demandent, c’est du débit.
Quant aux débits, si nous ne les affichons pas, c’est qu’ils dépendent de beaucoup de choses. […] Aujourd’hui, on dit juste qu’on offre de la 3G et qu’on met tout en œuvre pour maximiser les débits. »

– La rançon du succès, la portabilité… et Stéphane Richard
Site injoignable, retards de livraison… Le lancement de Free Mobile s’est fait un peu dans la douleur. Xavier Niel s’explique.

Réponse :
« Oui, au premier jour, on a été débordé par notre succès. Les demandes d’informations ont été supérieures à trois ou quatre millions le premier jour, c’est pour ça que le site n’a pas fonctionné. Il n’a pu rouvrir que 24 heures après notre lancement.Nous sommes ensuite confrontés à un problème majeur de portabilité. […] On passe par un organisme, un GIE pour cela. Un GIE dans lequel on trouve l’ensemble des autres acteurs à qui on prend des abonnés – autant vous dire que notre côté paranoïaque nous fait douter de l’objectivité de l’ensemble.
J’entendais Stéphane Richard sur Europe 1 dire qu’il avait déjà récupéré quelques dizaines d’abonnés à Free. Oui, quand la portabilité n’a pas marché, ça c’est sûr qu’il récupère des abonnés… Les personnes avec lesquelles on a du retard sont pour l’essentiel ceux qui veulent faire porter leur numéro. L’autre souci, ce sont ceux qui ont leur portabilité sans recevoir leur carte SIM. Mais quand on envoie des centaines de milliers de courriers, certains se perdent… »

– Les terminaux
Les nouveaux abonnés les attendent mais ils sont en retard. Xavier Niel explique pourquoi il ne croit pas à l’achat subventionné lié à une période d’engagement, prôné par ses concurrents.  

Réponse :
« Qu’ont fait les opérateurs ? Ils ont fait un crédit déguisé sans respecter la loi ! On vous a donné un téléphone en vous demandant de vous engager sur 24 mois, ce qui n’est ni plus ni moins un crédit à la consommation. Aujourd’hui, nous ne vendons pas de terminaux, c’est un choix, car tant que nous n’avons pas rattrapé le retard de portabilité, qui est un véritable problème, on ne va pas ajouter des abonnés supplémentaires. […] C’est un choix délibéré, le jour où nous aurons des délais normaux de portabilité – moins de trois jours – nous mettrons en vente nos terminaux. »

– L’offre à deux euros
Si la concurrence s’aligne sur Free autour de son forfait illimité, personne ne combat en revanche son forfait à deux euros. Pourquoi ? La réponse est simple, selon Xavier Niel.

Réponse :
« Il y a un énorme silence sur cette offre… Car vous avez la dictature de l’ARPU
[revenu annuel moyen par client, NDLR] et cette offre, c’est un tueur d’ARPU. On pense que c’est quelque chose de juste, de bon, que tout le monde devrait faire. Et personne ne nous imite. »

– Les soucis d’envoi de MMS

Réponse :
« Les problèmes d’envoi de MMS n’existent qu’avec Bouygues Telecom, qui a un peu retardé notre interconnexion, mais je suis sûr qu’ils sont de très bonne foi, donc le problème devrait être réglé dans les minutes qui viennent.
» [rires fournis dans la salle NDLR]

Lire notre dossier Free Mobile.

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Eric le Bourlout