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François Élie (Adullact)

‘ L’argent public ne doit payer qu’une fois. ‘

François Élie, enseignant et conseiller municipal d’Angoulême délégué aux NTIC, est un partisan déclaré du logiciel libre. Il milite pour son adoption dans les administrations et les collectivités au sein de l’Adullact (Association
des développeurs et utilisateurs de logiciels libres pour l’Administration et les collectivités territoriales), dont il est l’un des fondateurs.Décision Informatique : Vous êtes agrégé de philosophie et conseiller municipal. Quel est le lien avec le logiciel libre ?François Élie : Mon intérêt pour l’informatique a débuté avec le Minitel et l’émergence des réseaux. Depuis vingt ans, je suis informaticien la nuit et la philosophie me nourrit. Durant les années 90, j’ai compris
que la bataille pour les outils gratuits était celle des logiciels libres, et j’ai animé des ateliers à l’université, en particulier sur Apache. En 2001, j’ai été élu au conseil municipal d’Angoulême, et nous avons lancé le slogan
‘ Angoulême pour les logiciels libres ‘.Et comment a été créée l’Adullact ?Pour la fête de l’Internet 2002, nous avons distribué le magazine municipal d’Angoulême avec un CD contenant une cinquantaine de logiciels libres. Les habitants les ont-ils adoptés ? Je n’en sais rien. Mais, des SSII locales, qui
cherchaient une autre façon de travailler dans l’informatique, m’ont incité à monter une association.En septembre 2002, l’Adullact a été fondée par plusieurs villes, départements et régions avec la FSF [Free Software Foundation, NDLR], l’April, l’Aful, et quelques SSLL. Depuis, de nombreuses collectivités nous
ont rejoints, et l’Adullact emploie aujourd’hui cinq personnes.Quelle vocation a l’association ?Le premier objectif est de constituer un patrimoine commun de logiciels métier, les logiciels d’infrastructure libres existant déjà. Comme un logiciel libre est gratuit dès que son développement a été financé, l’idée est de se réunir
pour rémunérer les codeurs et inciter les membres à partager ce qu’ils ont déjà développé.Le modèle des logiciels libres s’impose logiquement pour les collectivités et les administrations parce que l’argent public ne doit payer qu’une fois. Avec la politique de décentralisation par exemple, la gestion du RMI a été
transférée aux départements. On aurait pu faire développer un logiciel une seule fois et l’utiliser partout. Au lieu de cela, il y a eu 100 appels d’offres pour réaliser la même chose.L’idée du logiciel libre est-elle facile à faire comprendre ?L’un de nos rôles est de convaincre du sens du modèle libre, ce dont beaucoup de personnes ne sont pas persuadées. Je leur explique que le modèle propriétaire est très récent, et qu’au regard de l’informatique des années soixante-dix,
il reste surprenant qu’on fasse de l’argent avec du logiciel.Une couche commune ouverte est indispensable à l’activité collective, comme les maths qui forment un socle commun libre, gratuit, qui profite à tous. Les théorèmes n’ont pas de propriétaires, personne ne paye pour les utiliser. Et
lorsqu’on reproche au libre d’être développé par des amateurs, je rappelle que Descartes et Leibniz étaient aussi des amateurs.Quelles sont les réactions des politiques vis-à-vis du libre ?Parfois, ils ont conscience des impératifs technologiques propres à leur moment historique, comme Al Gore avec les autoroutes de l’information. En Europe, nous pinaillons encore sur des questions technologiques alors que ce sont les
enjeux économiques qui comptent.Le logiciel libre, c’est toujours de l’informatique, mais avec un autre modèle économique. C’est aujourd’hui, et avec le libre, qu’il faudrait mettre en place un plan calcul.

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Renaud Bonnet