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France Télécom dans une impasse stratégique

Un cours de Bourse en chute libre, un endettement difficile à résorber, une politique européenne à l’arrêt, France Télécom traverse une phase critique. L’avenir des filiales de l’opérateur semble moins problématique.

France Télécom a réalisé des performances opérationnelles satisfaisantes au premier semestre mais se trouve dans une impasse stratégique en raison de son endettement colossal, selon les analystes financiers.La crainte d’un flowback massif ?” c’est-à-dire une remise sur le marché des actions rachetées à Vodafone dans le cadre de l’acquisition d’Orange et qui représentent 9,9 % du capital ?” et les interrogations sur les moyens de réduire la dette estimée à 62 milliards d’euros pèsent sur le titre. En outre, la perspective d’une sortie de l’indice Stoxx 50 ne laisse pas les investisseurs indifférents.En chute libre depuis plusieurs séances, France Télécom était de nouveau en baisse lundi matin, cédant 4,64 % à 33,70 euros vers 11 h 15 après un plus bas à 33,3 euros, niveau jamais vu depuis janvier 1998. Le titre, qui a perdu ainsi près de 40 % en un mois, se rapproche du prix d’introduction de 27,75 euros accordé aux particuliers lors de l’ouverture du capital à l’automne 1997 et se situe bien en dessous du prix d’OPV de 59,46 euros de la deuxième tranche, fin 1998.

Conjoncture peu favorable à une réduction de la dette

Dans ce contexte, les spécialistes du secteur souhaitent une clarification de la part du PDG du groupe, Michel Bon, qui doit présenter les résultats semestriels mercredi et jeudi. “Le marché attend une solution sur la question du flowback et, associée à cela, une solution sur la question de la réduction de la dette”, explique François Travaillé, qui dirige la recherche sur les télécoms chez BNP Paribas Equities.Pour Jean-Pierre Gérémy, de Fideuram Wargny, outre la croissance des ventes à l’international et l’évolution d’Equant dans le groupe, ” l’évolution de la dette constitue l’une des principales questions car France Télécom avait annoncé un plan initial sur lequel nous attendons des précisions “.Le groupe tablait à l’origine sur des cessions d’actifs non stratégiques ?” les participations dans Sprint, Deutsche Telekom et STMicroelectronics ?” et sur son parc immobilier pour reconstituer ses finances mais l’effondrement des marchés rend problématique ce programme. Un analyste travaillant pour un grand courtier parisien estime que la meilleure solution serait d’annoncer un “moratoire” sur la remise sur le marché d’actions rachetées à Vodafone et la mise en sommeil de la stratégie paneuropéenne pour se recentrer sur les marchés français et britanniques. Une telle décision lui donnerait plus de souplesse financière.

Une marge de man?”uvre réduite à néant

France Télécom a publié jeudi ?” avec une semaine d’avance en raison d’une bévue attribuée à une “erreur informatique” ?” un Ebitda (résultat brut d’exploitation) total en progression de 14 % à 6,066 milliards d’euros au premier trimestre. La hausse a atteint 102 % à 1,63 milliard pour la filiale de téléphonie mobile Orange tandis que la société Internet Wanadoo a réduit sa perte à 54 millions contre 57 millions.Ces chiffres ont été bien accueillis par les analystes financiers mais n’ont pas freiné la chute du titre. ” C’est mieux que prévu pour Orange, en ligne en masse mais décevant au niveau des marges sur le fixe et en dessous des estimations sur l’international “, dit François Travaillé.Les analystes, qui tablent dans l’ensemble sur une perte nette hors éléments positifs exceptionnels, estiment que l’Ebitda de l’exercice devrait se situer à 12 milliards d’euros. Mais ils ajoutent que les frais financiers s’établissent à 4 milliards et les investissements à 8 milliards, ce qui signifie que le groupe n’a aucune marge de man?”uvre. Ils soulignent que toute acquisition importante est impossible par échange d’actions en raison de la faiblesse du cours ni en cash en raison du niveau d’endettement.

Stratégie européenne au point mort

Du coup, France Télécom, qui voulait devenir un “acteur paneuropéen”, a une présence majeure dans seulement deux des cinq principaux pays européens, et doit se contenter d’une position minoritaire en Italie et d’une activité marginale en Espagne.Certains experts pensent que France Télécom devrait annoncer qu’il renonce à exercer son option en vue de prendre le contrôle de l’allemand MobilCom, une société de commercialisation de services dont il détient déjà 28,5 % du capital. Or, MobilCom, qui a réussi à dégager un Ebitda positif au deuxième trimestre au prix d’une réduction des coûts, est très endetté en raison de son engagement dans la téléphonie mobile de troisième génération UMTS, la licence allemande seule lui ayant coûté 8,4 milliards d’euros.En dehors des difficultés financières, France Télécom subit aussi les conséquences de sa politique de cotation des filiales puisqu’il compte trois entités en Bourse : Wanadoo, Equant et Orange. S’ils se refusent à parler de décote de holding en raison du contrôle ferme sur les filiales et des offres intégrées, les spécialistes du secteur jugent que la situation est pénalisante. “Dans ce genre de situation, il est fréquent que l’on préfère les filles à la mère”, dit l’un d’eux.

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La rédaction (avec Reuters)