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Face au scandale de surveillance PRISM, que savaient les politiques européens ?

En 2012, une étude du Parlement européen soulignait, dans l’indifférence générale, le risque d’une surveillance massive et mondiale par les autorités américaines. La députée Françoise Castex vient maintenant de saisir la Commission européenne.

Révélé par The Guardian et The Washington Post, le programme de surveillance PRISM est un énorme scandale, mais aussi un coup dur pour les responsables politiques européens. En effet, une étude du Parlement européen de 2012 avait déjà pointé du doigt la loi FISAAA (Foreign Intelligence Surveillance Act Amendments Act), et en particulier l’article 1881a qui autorise de facto « une surveillance de masse ciblée spécifiquement sur les données de personnes qui vivent en dehors des Etats-Unis ». Cette étude n’a pas provoqué un très fort émoi à Bruxelles. Il faut dire qu’elle restait théorique : elle soulignait le fait qu’une telle surveillance était juridiquement possible.

« Le pire scénario que nous nous étions imaginé »

Les informations de nos confrères britanniques et américains apportent maintenant la preuve qu’une telle surveillance de masse a bel et bien été implémentée et qu’elle fonctionne depuis plusieurs années. « Cette révélation confirme totalement notre travail, explique Caspar Bowden, l’un des coauteurs de l’étude du Parlement européen. Néanmoins, j’avoue avoir été estomaqué par l’ampleur de ce programme de surveillance. Il s’agit en fait du pire scénario que nous nous étions imaginé. » En effet, selon les informations révélées, neuf géants de l’Internet ont été « enrôlés » dans le programme de surveillance PRISM, depuis l’année 2007, dont Google et Facebook. Apple est le dernier à l’avoir rejoint.

Evidemment, aucune de ces grandes marques n’a avoué faire partie de ce club secret. Au contraire, elles nient tout en bloc, tour à tour. Mais ont-elles réellement le choix ? En effet, la loi FISAAA est une loi qui concerne le renseignement extérieur et la sécurité nationale des Etats-Unis. Avouer l’existence de ce procédé de surveillance pourrait enfreindre la loi US Espionage Act, qui interdit la publication d’informations classées sur les méthodes de renseignement.

D’ailleurs, le directeur national du renseignement américain, James Clapper, le dit sans détour dans un communiqué publié hier : « La révélation non autorisée d’informations sur ce programme important et complètement légal est répréhensible et met en péril la sécurité des Américains ». Un message que les directeurs de communication de tous ces géants du web ont certainement reçu cinq sur cinq.

Mais que fait la Commission ?

La question qui se pose maintenant: que va faire l’Europe ? Il n’existe aucune preuve que les données personnelles de citoyens européens ont été aspirées au travers de PRISM, mais c’est très probable. Alors que des négociations politiques sont en cours sur le projet de règlement pour l’amélioration de la protection des données personnelles, les responsables politiques européens vont devoir prendre position : faut-il laisser faire les autorités américaines, ou ériger des barrières de protection ? Et dans ce cas, comment faire, car il est difficile de contrôler les flux de données sur la Toile ?

Afin de remuer le pouvoir exécutif européen, l’eurodéputée Françoise Castex a, dès aujourd’hui, saisi la Commission européenne. En particulier, elle demande si la Commission était informée de l’existence de ce système de surveillance et ce qu’elle prévoit pour protéger la vie privée des ressortissants de l’Union. Il sera intéressant de connaître les réponses.

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Retrouvez notre dossier complet. Prism : surfez, vous êtes surveillé !

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Gilbert Kallenborn