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Exclusif : Sony prépare l’arrivée de l’IA dans les appareils photo

Après avoir bousculé Canon et Nikon sur le segment des appareils à capteur 24×36 avec ses hybrides Alpha, Sony prépare la prochaine révolution technologique des appareils photo : l’arrivée de puces d’intelligence artificielle.

A l’occasion de la remise des prix des Sony World Photo Awards 2018 qui se déroule à Londres, la marque japonaise nous a proposé de discuter avec Kenji Tanaka, le chef du développement des appareils hybrides. Le défi était de taille : nous l’avions rencontré pour la première fois au siège de Sony à Tokyo en septembre 2017, et s’il s’était montré le plus loquace et direct de nos interlocuteurs, il n’avait jamais accepté d’aborder les développements des futurs appareils de la marque. Autant dire que nous marchions sur des œufs… jusqu’au moment où, à l’écart de la pression du Japon et peut-être charmé par le beau temps londonien (si, si), l’ingénieur en chef a lâché un mot magique : intelligence artificielle.

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Cette IA que nous vantent les constructeurs de « téléphones intelligents » -Huawei en tête avec son P20 Pro– concernerait aussi les appareils photo plus « bêtes ». Mais pas n’importe lesquels : seulement les hybrides. « Nous allons profiter d’une force que les hybrides ont par rapport aux reflex : ils regardent la scène en permanence », explique Kenji Tanaka.

Equipés d’un miroir qui renvoie dans un prisme l’image vue par l’optique, les reflex traditionnels sont aveugles la plupart du temps, ne « voyant » ce qu’il se passe qu’au moment de la capture. Puisqu’ils doivent afficher l’information sur un écran ou un viseur électronique, les hybrides doivent avoir un capteur continuellement sollicité. « Nous voulons profiter du fait que le capteur scrute en permanence la scène pour récolter des données sur l’environnement. Nous avions déjà développé un système de tracking de l’œil (dans l’A7R Mark III notamment) mais nous pouvons aller plus loin comme faire en sorte que l’appareil reconnaisse un train quand il en “voit” un, et qu’il s’adapte à ce sujet ». De la bonne sélection du temps d’exposition (train + mouvement = vitesse haute) à l’identification d’un animal, les usages semblent sans limites. Mais comme pour toute innovation, ils se heurtent à des problèmes. Qu’il faut dépasser.

La latence : le nerf de la guerre de l’IA

L’IA dans la photo rime de nos jours avec les smartphones qui commencent à être équipés de puces dédiées à l’analyse « intelligente » de l’image. « Dans nos appareils photo aussi, nous pouvons envisager des processeurs d’intelligence artificielle », détaille prudemment Kenji Tanaka. Mais titillé à propos de l’avance qu’ont pris les smartphones photo dans ce domaine et de l’avantage qu’ils ont en termes de connectivité au Net, il réplique : « Il y a encore beaucoup à faire. Et il faut dépasser le problème de la latence : dans un appareil photo il faut que tout aille vite. L’autofocus est une première limite, mais ensuite [dans le cas de l’IA, NDLR] vient celui de la latence c’est-à-dire le temps qu’il faut pour analyser l’image ».

Un problème à deux composantes : « d’un côté il y a les capacités de calcul de la puce, de l’autre il y a les données ». L’IA repose en effet sur la classification et l’accès rapide à des bases de données. « Les dictionnaires de données [d’images, NDLR] existent, mais il faut bien penser la quantité de données à embarquer. » Car outre l’espace de stockage qu’une telle base peut représenter, il faut pouvoir y accéder en un clin d’œil. « La latence est un problème capital que nous devons résoudre. »

Embarquer des informations pour analyser intelligemment les images, Sony le fait déjà depuis longtemps dans ses téléviseurs : depuis 2012, c’est au travers de bases de données issues d’analyses de film que les algorithmes des processeurs X-Reality des téléviseurs haut de gamme effectuent les traitements d’images complexes, comme la mise à l’échelle de contenus web/DVD/HD sur des dalles 4K. La division photo de Sony peut-elle profiter de ce savoir-faire dans la création de bases de données compactes ? « En théorie oui, même si je ne peux pas vous donner plus de détails. Notre laboratoire de développement peut profiter à toutes les divisions et nous pouvons piocher des savoir-faire dedans. »

Et quand pouvons-nous espérer voir arriver les premiers appareils ? « Nous avons connu une année 2017 intense avec la sortie de l’Alpha A9, de l’Alpha A7R Mark III et l’annonce en début d’année 2018 de l’A7 Mark III. Laissez-nous un peu de temps ! », sourit l’air fatigué Tanaka-san. Vu le rythme effréné des sorties d’appareils chez Sony, pas sûr qu’il prenne de vacances de sitôt.

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