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Eric Barbry (avocat) : ” La copie privée, c’est le droit pour l’utilisateur de reproduire une oeuvre pour son usage privé “

Le droit de reproduire une oeuvre sans l’autorisation de son auteur ne peut s’exercer que pour l’usage strictement personnel du copiste. Aucune communication à un tiers n’est autorisée dans le cadre de cette copie privée.



01net. :
Bonsoir à toutes et à tous, nous sommes heureux de recevoir Eric Barbry !
Eric Barbry : Bonsoir et merci de m’accueillir à nouveau. geekgirl : Qu’est-ce que c’est la copie privée ? La copie privée, c’est le droit pour l’utilisateur de reproduire les oeuvres, les interprétations musicales et sonores, ainsi que les enregistrements sonores ou audiovisuels, pour son usage privé et strictement non collectif. fanfan : Qu’est-ce qu’une oeuvre numérique ? La numérisation est une technique de fixation d’enregistrement, de stockage et de diffusion des données. Les oeuvres peuvent être numérisées dès leur création ou pour leur diffusion. Il n’existe pas à proprement parler d’oeuvres numériques, mais l’utilisation numérique des oeuvres est la réalité des nouvelles technologies.Voddoo : D’un point de vue pénal, imprimer un document (articles, passages de livres sur site perso, etc.) n’est, me semble-t-il, pas un délit. C’est pourtant une copie. Quelle est la différence alors avec la copie d’un morceau de musique ou d’un film ? Pourrait-il y avoir une espèce de jurisprudence ? Imprimer un document écrit sans l’autorisation de l’auteur est un délit réprimé comme la reproduction de la musique ou d’un film.sandra : L’exception de copie privée est-elle un droit (article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle) ou une simple tolérance vis-à-vis du droit d’auteur (impossibilité technique d’empêcher la copie privée) ? C’est un droit pour l’utilisateur de reproduire sans l’autorisation de l’auteur, de l’artiste et du producteur. Mais ce droit ne peut s’exercer que pour l’usage personnel du copiste. Aucune communication à un tiers n’est autorisée dans le cadre de la copie privée. sophie : L’article 6-4 de la directive communautaire consacre-t-il un véritable droit à copie privée ? Si oui, à quel niveau les mesures techniques de protection pourraient-elles faire échec à ce droit ? Les mesures techniques ne posent pas de problème particulier, si leurs protections juridiques sont limitées à la portée des droits d’auteur et droits voisins.Vodoo : Je parlais des articles de n’importe quel journal en ligne que l’on peut imprimer (il y a une icône) ? L’impression, à partir d’une communication en ligne, relève du droit de copie privée. Si elle est faite par une personne physique pour son usage personnel.Shawn : Quel est le périmètre de la copie privée ? La copie privée est limitée aux reproductions strictement réservées à l’usage privé et individuel ou exclusif de la personne qui copie. Marcoprince : Comment rendre légal un site de peer-to-peer ? C’est une plaisanterie ! zeduckman : Que pensez-vous de la taxe établie sur les supports de stockage numériques afin de récupérer l’argent perdu lié au piratage ? Cela ne légitimerait pas quelque part le piratage ? (Après tout, n’est-ce pas la première fois que l’on paie une taxe sur les possibilités criminelles d’un objet ?) La taxe n’est pas la contrepartie d’un piratage, mais l’indemnisation versée par les consommateurs aux auteurs, artistes et producteurs en contrepartie du droit de copie privée.GiZz : Ai-je le droit de graver des CD et de les distribuer gratuitement à mes copains ? Y a-t-il des problèmes lors d’une plus large diffusion ? Les graver pour votre usage personnel, oui. Pour les distribuer non, même aux copains.brigitte : Comment se protéger des copies illégales ? Est-ce que cela passe forcément par un dépôt dans une certaine institution ? Le dépôt facilitera la preuve de votre revendication en tant que auteur, artiste ou producteur. En aucun cas, ce n’est un mode de protection contre les actes de reproduction ou de représentation non-autorisés. geekgirl : Un CD qui m’empêche d’en faire une copie numérique est-il légal ? Oui, sous réserve de la copie privée.fauxtoman : Si je publie sur mon site des photos qui ne m’appartiennent pas, sans autorisation, en me disant que de toute manière le photographe qui a diffusé sa photo sur l’Internet connaît les risques inhérents à ce genre de technologie, est-ce que je risque quelque chose ? Furax : Si je mets sur mon site des photos trouvées sur d’autres sites, dès l’instant que je cite mes sources, ai-je le droit ? Dans l’un et l’autre cas, non, sauf à obtenir l’autorisation des titulaires de droits sur les photos.sophie : Au regard de la directive, les mesures techniques actuelles excluant toute possibilité de copie sur graveur informatique sont-elles licites ? A l’heure actuelle, il n’est pas possible de répondre. La directive laisse aux Etats trop de marge pour affirmer que la protection des mesures techniques porte non atteinte aux droits des utilisateurs. Les Etats ont seulement l’obligation de prévoir les mesures juridiques appropriées… Il faut attendre le projet de transposition.Skander-Olivier : Des questions sans doute naïves, mais j’ai du mal à comprendre la notion de propriété attachée aux oeuvres numériques (CD audio, logiciel, film…). Lorsque j’achète un de ces “objets”, qu’est-ce que j’acquière exactement ? Uniquement le droit de l’utiliser ou en suis-je propriétaire ? S’il s’agit plutôt d’acquérir le droit d’usage sans devenir vraiment le propriétaire ne faudrait-il pas considérer que c’est une location ? Du fait de l’achat l’auteur se retrouve rémunéré, aussi comment expliquer qu’il conserve un droit sur l’objet-oeuvre vendu(e) ? Ne devrait-il pas plutôt faire un contrat de location ? J’ai bien conscience de l’impact économique catastrophique qu’aurait l’abolition de ces droits et la disparition de la notion d’inventeur, mais il me semble que le contrat n’est pas très clair. Qu’est-ce qui différencie l’éditeur qui achète une photo ou une oeuvre musicale à un auteur afin de la reproduire pour la vendre ou la diffuser et l’utilisateur anonyme qui achète une de ces copies ? Sans doute est-ce le contrat justement ou l’absence de contrat dans le second cas. Quand on achète un CD, un DVD, un livre… on acquiert seulement le support matériel, en aucun cas on devient propriétaire des droits d’auteur et droits voisins. On n’est ni propriétaire, ni locataire de l’oeuvre. On peut seulement utiliser le support pour l’usage autorisé.Yoda : Bonjour, est-il vrai qu’il est considéré comme ” cas extrême ” et donc toléré par la loi, la copie d’un DVD prêté ou loué, à condition que cette copie ne soit pas, à son tour, copiée ? Merci. Oui, si la copie est strictement réservée à l’usage privé du copiste…sophie : A l’heure actuelle, en attendant la transposition de la directive, les mesures techniques de protection sont-elles légales ? Elles le sont, mais leur violation n’est pas directement sanctionnée en vertu de la propriété intellectuelle. moi : Est-ce que le simple fait de lire ce qui apparaît à l’écran, dès la connexion, ne nous met pas dans l’illégalité ? Seuls les actes de reproduction ou de diffusion non autorisés sont sanctionnés.zeduckmaster : Existe-il une différence entre copie privée et copie de sauvegarde au niveau juridique ? Oui, la copie privée est reconnue comme un droit pour l’utilisateur des oeuvres sauf en matière de logiciel. Dans ce cas, seule une copie de sauvegarde est autorisée. La jurisprudence a estimé qu’une copie de sauvegarde ne correspond pas au droit de copier. L’utilisateur légitime a seulement le droit de demander la copie de sauvegarde.sophie : Qu’entendez vous par légalité des CD protégés “sous réserve de la copie privée” ? La réserve vise le droit de la personne physique à copier pour son usage personnel. laurent : Dans le cadre de l’envoi d’une lettre électronique payante (ou non) en complément d’un service régulier à un client, est-il juridiquement possible d’interdire à celui-ci de retransférer cette lettre à l’extérieur ou même à ses collaborateurs au sein de son entreprise. Existe-il des exemples d’une telle pratique ? Concrètement, comment cela est-il appliqué ? Oui, le principe est l’interdiction de toute utilisation collective en application du droit d’auteur. J’ajoute que l’éditeur de la lettre peut naturellement utiliser le droit d’auteur pour accorder des licences multipostes. Dans ce cas, il est possible de diffuser la lettre dans les limites de l’autorisation.zeduckmaster : Lorsqu’un logiciel ne permet pas d’effectuer de copie de sauvegarde par diverses techniques anti-copies, sommes-nous en droit de demander cette copie de sauvegarde à l’éditeur ? Oui, vous avez ce droit.sophie : Sur quel fondement reconnaissez-vous la copie privée comme un droit et non comme une exception au droit d’auteur ? Cela revient au même, l’exception au droit d’un auteur est un droit pour l’utilisateur. Inversement, l’interdiction faite par la loi à l’utilisateur est un droit d’autoriser ou d’interdire pour l’auteur. astuces72 : Certains disent que le fait de copier n’empêche pas la vente des cd originaux. Est-ce exact ? Si oui, alors pourquoi tant de bruit pour rien ? Cette affirmation est peut être exacte mais sans lien avec la question juridique. Pensif : Bonjour. Si je suis possesseur d’un CD audio acheté au prix fort, ai-je le droit d’en sauvegarder une copie sur mon disque dur sous forme de plusieurs MP3 ? Est-ce que les pseudo-justiciers de la Sacem vont pouvoir venir effacer cette “copie” sur mon disque dur pendant que je surferai ? Un sbire d’Universal pourrait-il également effacer au passage mon mémoire de fin d’études et tout mon disque dur sous réserve qu’ils n’ont pas une valeur ? Si le stockage sur le disque dur est destiné à votre usage privé… dédé : Quelles sont les poursuites possibles au cas où on serait arrêté avec des copies ? Les poursuites prévues sont 2 ans de prison et 150 000 euros d’amende.superjarodd : Je suis étudiant en multimédia. Sur chaque ordinateur de mon école, il y a plusieurs logiciels d’une valeur de 4 500 euros au total. J’ai besoin de ces logiciels dans le cadre de ma formation, néanmoins je n’ai pas les moyens de me les procurer en version officielle. Je n’ai d’autre solution que de les pirater. Y a-t-il une alternative légale pour ce genre d’utilisation personnelle ? Que peut-on faire dans ce cas précis
?
Dans le cadre de votre formation c’est à l’organisme qui dispense l’enseignement de prendre en compte les licences nécessaires au bon déroulement du cycle d’étude. Dans tous les cas, vous ne devez pas reproduire des logiciels de votre propre initiative.Rinaldo : Y a-t-il beaucoup de condamnations pour ce genre de délit ? S’il n’y a pas revente derrière comme le font les sites de warez, pourquoi punir ? Le risque existe et le fait que certains contrefacteurs passent au travers des poursuites ne constitue pas un argument juridique qui vous permette une défense utile. Il existe des exemples de centres de formation qui ont été poursuivis. sophie : Le droit d’auteur est-il “plus fort” juridiquement que l’exception de copie privée ? Non, l’un et l’autre ne sont pas en conflit. Chacun a son domaine propre. Le terrain des droits exclusifs est plus étendu que celui du droit de copie privé.

01net. :
Merci Eric Barbry, le mot de la fin ?
A très bientôt pour discuter du projet de loi qui transposera la directive européenne (avant la fin de lannée). Merci à tous, bonne soirée !

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La rédaction