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Elle roule pour vous…

Depuis deux ans, Google teste des voitures capables de rouler de manière totalement autonome au milieu des autres véhicules.

La voiture file à vive allure sur l’autoroute. À son volant, vous prêtez une attention toute particulière… au film qui s’affiche sur l’écran LCD intégré à la planche de bord : un vrai navet. Dépité, vous éteignez le lecteur et inclinez l’assise du siège. Il reste encore deux heures de route avant de quitter la voie rapide, autant en profiter pour faire un somme. Ce rêve, tous les automobilistes l’ont fait, à la suite d’un trajet éreintant ou après avoir affronté deux heures d’embouteillage. Une utopie ? Pas du tout. Dans dix ans, vous pourrez acheter une voiture à conduite automatique et évoluer au milieu du trafic. Ce genre de véhicule circule déjà aux États-Unis depuis deux ans. À l’origine de cet ambitieux projet ? Google.Lorsque l’entreprise dévoile les premières informations sur cette expérimentation, en octobre 2010, la surprise est totale. Dans le plus grand secret, la flotte de véhicules automatiques, composée de six Toyota Prius et d’une Audi TT, a parcouru 225 000 km, dont 1 500 sans aucune intervention humaine.Les véhicules ont emprunté Hollywood Boulevard à Los Angeles, descendu Lombard Street, la fameuse rue aussi vertigineuse que sinueuse de San Francisco ou encore parcouru la Pacific Road, l’autoroute californienne qui longe l’océan. Au volant ou sur le siège passager, des ingénieurs recrutés parmi les participants aux Darpa Challenges. Ces compétitions, organisées en 2004, 2005 et 2007 par l’agence de recherche américaine pour la Défense, proposaient de concevoir un véhicule totalement autonome, avec à la clé une récompense de 2 millions de dollars. L’historique du concours donne une idée de la fulgurante évolution des technologies de conduite automatique. En 2004, lors de la première édition qui se déroulait dans le désert du Nevada, aucun véhicule ne parvint au terme de l’épreuve. Trois ans plus tard, la compétition Urban Challenge se déroulait en ville, sur un parcours protégé de 90 km. Six des onze véhicules engagés ont rallié la ligne d’arrivée. Mais, jusqu’à présent, aucune voiture n’avait roulé en toute autonomie au milieu du trafic.

Google passe au pilotage automatique

Les “ Google Automated Cars ” sont conçues à partir de modèles du commerce. Difficile pour autant de ne pas les remarquer, même si elles se révèlent plus discrètes que les “ Google Cars ” et leur immense mât caméra. Quatre pièces maîtresses composent le dispositif : le lidar (lire l’encadré), les caméras vidéo, les radars et le calculateur de position. À l’heure actuelle, ces véhicules sont incapables d’évoluer dans un environnement inconnu. Les itinéraires de test sont d’abord modélisés en 3D afin de générer des cartes superdétaillées du parcours. Ces repérages sont effectués grâce au lidar installé sur le toit des “ Google Automated Cars ”, conduits manuellement pour l’occasion. L’expérience peut alors débuter. Le pilote lance la conduite automatique tandis qu’à ses côtés, le second ingénieur surveille le logiciel de contrôle des instruments et vérifie la trajectoire sur un PC portable. Durant la navigation, le lidar et les radars installés autour du véhicule surveillent le trafic et autres obstacles mobiles, tels que les piétons. Rivée au pare-brise, la caméra détecte les feux de signalisation et adapte la conduite en conséquence. Enfin, un capteur situé sur la roue arrière gauche analyse la position du véhicule par rapport à la trajectoire de référence, le moindre écart étant immédiatement corrigé.

Une technologie au service de la sécurité

Le véhicule utilise la cartographie pour déterminer la vitesse autorisée et pour indiquer les changements de direction au conducteur. En effet, la base de données intègre des informations très précises, telles que le nombre de voies d’une route et leur largeur, et tous les panneaux de signalisation. Le conducteur peut reprendre la main à tout moment, soit en pressant le bouton d’arrêt du système, soit en touchant le volant ou en appuyant sur une pédale. Lors des tests, les véhicules ont correctement réagi aux situations imprévues (piéton qui traverse hors des passages protégés, véhicule qui change de file ou qui freine brusquement…). Le système dans son ensemble s’est révélé bien plus fiable que l’humain, pour la simple raison qu’il analyse son environnement sur 360° en permanence, et de manière plus rapide. Rien n’échappe au lidar et aux radars, et ces appareils ne connaissent aucun défaut de vigilance. C’est là l’un des principaux objectifs de cette technologie : réduire de moitié le nombre de morts sur les routes. Elle présente aussi un autre intérêt, moins évident à première vue. Google estime que la productivité des entreprises pourrait être accrue, les automobilistes profitant de leur temps de trajet pour travailler. Enfin, l’automatisation à grande échelle permettrait de limiter les embouteillages et ainsi de baisser les émissions de gaz à effet de serre.Néanmoins, il faudra au moins dix ans avant de pouvoir s’offrir un véhicule automatique. En effet, ce mode de conduite ne présentera d’intérêt que lorsque le logiciel sera capable de générer en temps réel une carte 3D de l’environnement à partir des données collectées par le lidar. Or les ordinateurs actuels, ou tout au moins ceux assez compacts pour être installés dans un véhicule, sont loin de procurer la puissance de calcul nécessaire. À la contrainte technique s’ajoute celle juridique. La législation de la plupart des pays industrialisés impose aux automobilistes de garder en permanence les mains sur le volant et de n’effectuer aucune action susceptible de troubler la concentration.Pourtant, au final, c’est l’humain qui pourrait être le principal frein à la démocratisation de cette technologie. En effet, qui aujourd’hui se sent prêt à lâcher le volant de sa voiture lancée à 130 km/h sur l’autoroute, pour piquer un petit roupillon ?

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Philippe Fontaine