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Droit d’auteur : l’Allemagne plus répressive que la France

Outre-Rhin, le nouveau projet de loi sur les droits d’auteur prévoit jusqu’à deux ans de prison pour les internautes qui téléchargent illégalement des fichiers.

‘ Scandale ‘ pour les associations de consommateurs, ‘ compromis acceptable ‘ pour l’industrie. Outre-Rhin, les commentaires vont bon
train sur le nouveau projet de loi allemand concernant le droit d’auteur et les droits voisins. En 2003, un premier texte avait été voté pour transposer la directive européenne de 2001. A l’époque, il avait été adopté à la va-vite pour
répondre aux exigences du calendrier. Depuis, un projet ‘ rectificatif ‘, pour une clarification, était attendu. Le nouveau projet de loi a été adopté, le 22 mars dernier, par le Conseil des ministres allemand et doit
désormais passer devant les deux chambres du Parlement (Bundestag et Bundesrat).Ce texte se montre beaucoup plus répressif que la loi actuellement en vigueur. Le projet de loi allemand indique qu’il n’y a pas de ‘ droit à la copie privée au détriment des détenteurs de
droits ‘
: tout contournement d’un dispositif anticopie est donc clairement interdit. Les ‘ petits poissons ‘, c’est-à-dire les utilisateurs qui copient un CD protégé ou téléchargent
illégalement un fichier et le mettent à disposition, commettent un délit et encourent jusqu’à deux ans d’emprisonnement.
En France, selon la loi DADVSI, récemment adoptée par l’Assemblée nationale : en cas de flagrant délit, le téléchargement illégal de musique ou d’un film pour son usage personnel
relève de la simple contravention de première classe (38 euros). L’amende est portée à 150 euros en cas de mise à disposition des fichiers incriminés. En Allemagne, le pirate professionnel, qui fait commerce de fichiers illégalement
obtenus, encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.Le texte n’a évidemment pas manqué de faire réagir les représentants des consommateurs et des utilisateurs, ainsi que les partis libéraux, ceux de gauche et les écologistes. Pour Edda Müller, présidente de l’Union
fédérale des associations de défense des consommateurs, citée par le site high-tech Heiseonline.de, ce n’est pas seulement risquer de ‘ criminaliser ‘ de nombreux jeunes, c’est aussi
‘ le meilleur moyen de surcharger les tribunaux ‘.

Un projet de loi jugé flou

Pour le Chaos Computer Club, association de mordus d’informatique, la déception est profonde. ‘ Cette loi est un catalogue dressé par les industriels. Contrairement à la loi française, les questions
d’interopérabilité et de protection des données ne sont pas abordées. En clair, si l’on n’est pas bien équipé, on peut perdre sa collection de fichiers musicaux quand son lecteur casse. Par ailleurs, il n’y a rien pour
encadrer l’utilisation possible des données recueillies par les systèmes DRM et qui peuvent être utilisées pour cibler le consommateur. ‘
Pour Grietje Bettin, spécialiste de la question au parti écologiste,
le texte actuel est également dangereux pour les échanges scientifiques et l’enseignement, car rien dans le projet de loi ne garantit une utilisation libre de documents dans un tel cadre.Le projet de loi veut aussi redéfinir le prélèvement des droits d’auteur sur les supports vierges ainsi que sur les appareils de lecture et d’enregistrement. Constatant que les systèmes anticopie se sont largement
développés, le texte envisage une limitation, voire une baisse des taxes, elles ne devront pas excéder 5 % du prix de vente. A l’avenir, le niveau de ces taxes sera d’ailleurs défini par les fabricants, les producteurs et les
sociétés de droits d’auteur et non plus par le gouvernement. Enfin, la loi garantit aux bibliothèques publiques, musées et archives, une utilisation gratuite de documents.Le vote de la loi est attendu pour la fin 2006. D’ici là, le texte devrait être la cible de nombreux amendements et déclencher des débats passionnés. D’autant plus que le Gouvernement allemand concocte un second
projet de loi, en vue de l’application de la directive européenne de 2004 sur la propriété intellectuelle. Avec, au programme, une mesure qui sannonce explosive : l’obligation qui pourrait être faite aux FAI de renseigner les
industriels et détenteurs de droits d’auteur sur les activités illicites de leurs clients.

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Thomas Schnee, à Berlin