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DotEmu, les archéologues du jeu vidéo

Historien, archéologue et conservateur du jeu vidéo, DotEmu, petite société parisienne, s’attache à donner une seconde jeunesse aux grands titres de l’histoire vidéoludique.

A gauche, Xavier Liard, 26 ans, cheveux courts et visage rond et lisse. A droite, Romain Tisserand, 27 ans, geek à la barbe bien taillée et au regard perçant derrière des carreaux épais. Deux jeunes ingénieurs qui ont fait le choix de ne pas entrer dans le moules des SSII et de se lancer dans l’aventure de l’entreprenariat. « L’idée du projet est arrivée en juin 2007, explique Romain. Nous terminions notre stage de fin d’études de notre cycle ingénieur à l’UTC, moi chez Wizart et Xavier chez Dassault Systèmes. »

Riche idée

DotEmu n’est pas un studio de développement de jeux traditionnel, puisque cette petite équipe s’est donné une autre mission : faire redécouvrir des jeux anciens, connus sous les noms d’« abandonwares » et d’« émulations ». Il existe tout un monde de passionnés nostalgiques qui s’affairent autour de ces trésors délaissés.

Mais c’est la plupart du temps hors du cadre légal – les ayants droit ne touchent rien – et sans garantie technique, donc réservé aux bidouilleurs. Loin d’être une lubie passagère, le projet de DotEmu, quant à lui, naît de la passion de Romain : la programmation d’émulateurs. « A l’époque, j’avais déjà à mon actif plusieurs émulateurs Java qui tournaient dans un navigateur, explique-t-il. Et c’est après avoir refusé deux offres d’emploi d’entreprises de jeux vidéo que l’envie d’industrialiser la chose m’est venue. » Il apporte ses compétences de programmation et de rétro-ingénierie ; Xavier, ses spécialisations en marketing et en management.

Au commencement…

L’aventure commence, dans un petit local mis à leur disposition par Paris-développement, par une recherche de fonds. Opération d’autant plus difficile que les deux jeunes gens passent pour des extraterrestres. « On nous a pris pour des fous au départ, raconte Xavier. La question qui revenait le plus souvent était  “Pourquoi vouloir jouer à d’anciens jeux alors qu’il y en a des nouveaux qui sortent ?”. C’était très dur de nous battre contre ces mentalités et d’expliquer qu’il y avait pas mal de gens qui voudraient retrouver ces titres. » Mais les retrouver sur des machines modernes. Et des machines, puisque ces passionnés développent leurs solutions aussi bien pour les téléphones mobiles que pour le Web ou sous la forme d’installeur PC.

Fin 2007, ils finissent par lever 120 000 euros de frais d’amorçage en remportant le concours Anvar de l’Agence nationale pour la recherche (ANR), qui dépend du ministère de la Recherche.

Expérience mobile

Ils décident alors de se lancer sur le marché du smartphone et du Palm en récupérant les licences de Krypton Egg et de Nicky Boom. Une expérience qui leur apprend trois choses. Premier enseignement : porter une application sur un parc aussi hétérogène est un défi. Deuxième leçon : négocier les droits d’un vieux jeu prend entre six mois et un an, ce qui, quand on n’a pas encore de légitimité, est de loin le travail le plus long et le plus fastidieux, selon les deux créateurs de DotEmu. Enfin, dernier apprentissage, lourd : pirater sur Symbian (le système des téléphones Nokia) prend 4 heures, montre en main.

« L’année 2008 fut tendue : nous ne vendions pas assez de jeux pour être à l’aise, les négociations étaient dures, et nous avons abandonné la plate-forme Symbian », explique Xavier. « Définitivement », confirme Romain, visiblement dégoûté.

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Adrian Branco