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Données et programmes font chambre à part

La grande informatique et la micro à sa suite ont adopté la séparation entre traitements et données. Un concept peu logique, qu’il serait peut-être temps de repenser.

Regardez bien les icônes qui fleurissent sur votre écran, ou sur celui de vos collègues, avec Windows. Mine de rien, elles appartiennent à deux familles bien distinctes. Celles qui ouvrent des documents, et celles qui lancent des
logiciels. Certes, pour un même logiciel, l’icône programme et l’icône documents ne sont pas exactement les mêmes. Mais qui connaît vraiment la nuance ?N’est-il pas illogique de mettre sur le même pied le programme et les données ? Pour un utilisateur lambda, l’action d’ouvrir un document ou de charger un dessin est familière : il fait le rapprochement avec l’ouverture d’un
dossier de papier. Mais lancer un programme est un geste beaucoup moins naturel.Ce cloisonnement entre traitements et données n’est pas nouveau. Il remonte même à l’origine de l’informatique. Je ne parle même pas de la micro, mais de la ‘ grande ‘, celle des monstres de trente tonnes nés
en 1946. A l’époque, la mémoire vive pouvait être répartie entre programmes d’une part et données de l’autre. Le fait que chaque case mémoire puisse être indifféremment allouée à une instruction ou à une donnée a été salué comme une grande
innovation.Mais ce cloisonnement a vite été ressenti comme une gêne, notamment par les programmeurs. C’est pour cela qu’est née la programmation orientée objets (POO), avec laquelle chaque donnée pouvait être associée à des traitements qui lui
étaient propres et hériter des traitements associés à d’autres objets.Paradoxe : plus les programmeurs étaient imprégnés de la notion programmes-données, plus ils avaient du mal à se mettre à la POO (c’est du vécu !)Malheureusement, par inertie ou peur de l’innovation, la naissance de la micro-informatique, pourtant consacrée à l’utilisateur, puis l’avènement des interfaces graphiques, Mac ou Windows confondus, n’ont pas remis en cause le
sacro-saint principe : les données à ma gauche, les traitements à ma droite !Or, quand je veux ouvrir un document pour le lire ou travailler dessus, je souhaiterais être débarrassé du choix de l’outil. D’autant que la multiplicité des programmes, sur un PC, conduit parfois à des solutions paradoxales Ainsi,
l’utilisateur qui veut simplement afficher une image et qui clique deux fois sur son icône devra patienter pendant le (long) chargement de Photoshop. Alors que pour afficher simplement cette image, un petit logiciel comme ACDSee aurait largement
suffi. Certes, la solution existe (en l’occurrence, la commande ‘ Ouvrir avec ‘ du menu contextuel). Mais qui la connaît et se rappelle systématiquement son existence ?Bien sûr, cette remise en cause d’un principe de base de l’informatique entraînerait des frais de développement pharaoniques. Mais peut-être la simplicité d’utilisation de l’ordinateur, toujours promise et jamais obtenue, est-elle à ce
prix. C’est sans doute un beau rêve…*Rédacteur en chef adjoint de L’Ordinateur IndividuelProchaine chronique vendredi 28 mars

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Etienne Oehmichen*