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Digital Services Act : on fait le point sur la future loi européenne qui régulera Internet

L’Union européenne va présenter son texte cadre pour réguler Internet d’ici une semaine. En attendant, voici ce que l’on sait sur le Digital Services Act.

« Dans bien des cas, l’espace numérique est une zone de non-droit. » En octobre dernier, interrogé par le quotidien Le Monde, Thierry Breton, commissaire européen en charge du Marché intérieur, résumait l’esprit des futures lois européennes qui se cachent derrière le sigle : Digital Services Act (DSA). L’idée de l’Union européenne (UE) est bien de « réguler » ces « zones de non-droit ». Comment ? On fait le point. 

  • Qu’est-ce que c’est ? 

L’appellation DSA regroupe un ensemble de textes européens ambitieux dont l’objectif est de remettre au goût du jour un autre texte européen, la directive sur le commerce électronique de juin 2000. La Commission européenne doit présenter ce « package », selon les termes officiels, de deux grands règlements visant à moderniser la régulation d’Internet d’ici le 9 décembre prochain.

Le premier volet de ce texte s’attaque à l’encadrement des plates-formes et des réseaux sociaux afin de mieux lutter contre la haine en ligne et la désinformation. L’Europe ne devrait pas toucher à leur statut d’hébergeur, mais mise sur des obligations inédites de transparence des algorithmes et de coopération avec les régulateurs.  Concrètement, l’UE veut proposer « des règles claires encadrant les responsabilités des services numériques pour faire face aux risques auxquels font face leurs utilisateurs et pour protéger leurs droits » peut-on lire sur le site dédié au projet.

Le deuxième texte, intitulé Digital Markets Act, doit dépoussiérer le droit de la concurrence pour encadrer les activités des « plates-formes structurantes » (entendez « les Gafa »), permettre à des acteurs alternatifs d’émerger et empêcher les abus de position dominante. Ces « règles ex-ante » agiraient comme des « gardiens », fixant « les règles du jeu pour leurs utilisateurs et leurs concurrents ». L’objectif ? « Que les consommateurs aient le plus grand choix et que le marché unique reste concurrentiel et ouvert aux innovations ».

  • Qu’est-ce que cela implique ?  

D’après les informations divulguées par la Commission européenne, le premier volet, visant à responsabiliser les plates-formes, contiendrait des sanctions financières si elles ne retirent pas dans les délais impartis (non dévoilés à ce jour) les contenus illégaux. « Le conducteur du DSA est simple : ce qui est autorisé offline doit l’être online, ce qui est interdit offline doit l’être online. Que l’on parle de contrefaçon, d’antisémitisme, de pédopornographie, de menaces de mort, ou de vente de drogues, tous les contenus illégaux doivent être retirés. Les contenus haineux, l’amplification de la violence verbale et physique, la désinformation doivent être identités comme tels et traités en conséquence », explicitait Thierry Breton dans son entretien au Monde. Le secrétaire d’État au numérique parlait aussi, fin novembre, de lutter contre la contrefaçon sur Internet. 

Si la teneur exacte des mesures contenues dans la loi n’est pas encore connue, les rumeurs vont bon train – notamment concernant le deuxième volet, plus axé business. Il s’agirait d’une trentaine de paragraphes d’obligations et d’interdictions telles que : obliger au partage de données avec les entreprises concurrentes, interdire la pré-installation de leurs applis sur les smartphones ou encore faciliter leur désinstallation. 

Selon un document qui a fuité dans la presse autrichienne, les sociétés comme Amazon et Google ne pourraient « pas utiliser les données recueillies sur leur plate-forme […] pour leurs propres activités commerciales […] à moins qu’ils [les rendent] accessibles aux utilisateurs professionnels actifs dans les mêmes activités commerciales ». Autrement dit, les données devraient être partagées entre tous les acteurs du marché, donc ne plus être le privilège de quelques uns. 

Le DSA suggère aussi que les Gafa ne puissent plus mettre en avant leurs propres services sur leurs plates-formes au détriment de ceux de leurs rivaux. Ces entreprises pourraient être carrément interdites de préinstaller leurs propres applis. Pour prendre un exemple concret, Apple ne pourrait plus fournir d’emblée Apple Music ou Apple TV+ sur ses iPhone, étant donné qu’il existe des services concurrents.

  • Quel est le calendrier ? 

Les autorités européennes, et les 27 États membres, bouclent actuellement les derniers éléments de cette lois dont l’ambition est de réguler Internet pour les « vingt prochaines années », selon les mots de Thierry Breton. Notons que le texte a fait l’objet jusqu’au 8 septembre 2020, d’une consultation publique en ligne ouverte à tous les citoyens européens. Le texte devra ensuite être validé par les autres instances européennes, à savoir le Parlement européen (qui a déjà voté un brouillon) et le Conseil de l’Union européenne.

Sources : Commission européenne, Parlement européen et Le Monde. 

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Marion SIMON-RAINAUD