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Deutsche Telekom débarque en Amérique

Après deux ans de recherches, l’opérateur allemand rachète l’opérateur mobile américain VoiceStream pour 50,7 milliards de dollars par échange d’actions et en numéraire.

Le feuilleton américain de Deutsche Telekom vient de prendre fin. La rumeur circulait depuis quelques jours déjà : VoiceStream Wireless, l’un des derniers opérateurs indépendants américains, avec Sprint et Nextel, flirtait avec le géant Deutsche Telekom. Aujourd’hui, ils annoncent leurs noces. A première vue, l’allemand rachète un petit opérateur.Avec 2,3 millions d’abonnés, à la fin mars, il pointe à la huitième position dans le peloton des opérateurs de téléphonie mobile. Basé à Bellevue, dans l’Etat de Washington, il utilise la technologie DCS 1900, version américaine du GSM.Apparemment, Deutsche Telekom paie cher cet opérateur américain qui était valorisé, vendredi, à 31,9 milliards de dollars. L’opérateur allemand s’engage de ce fait à reprendre les 5 milliards de dollars de dettes de l’opérateur. Ron Sommer, le patron de Deutsche Telekom va donc devoir se lancer dans une offensive de charme, pour convaincre les investisseurs que le prix payé n’est pas déraisonnable.

Un opérateur prometteur

VoiceStream lui offre une couverture nationale, un nombre d’abonnés croissant ?” ils devraient être 4 millions à la fin de l’année. Par ailleurs, il devrait rapidement être capable de couvrir 70 % du territoire américain.
Ces perspectives vont pousser l’opérateur allemand à investir rapidement 5 milliards de dollars dans VoiceStream. Cet investissement permettra dès lors à l’opérateur américain de participer aux enchères pour de nouvelles fréquences, prévues cet automne. VoiceStream veut couvrir la Californie et le Sud-Est des Etats-Unis.Deutsche Telekom aurait réussi à convaincre John Stanton, son PDG, de conserver la tête des opérations mobiles américaines. Celui-ci est un des pionniers de la téléphonie mobile aux Etats-Unis, où il a participé au succès de McCaw Cellular.
Cette acquisition pourrait en préfigurer d’autres, dans le domaine des services professionnels (marché des entreprises et des dot-com). Elle redore ainsi le blason de Deutsche Telekom qui, depuis deux ans, éprouvait des difficultés à l’international. Désormais, l’opérateur allemand devient un partenaire de poids dans le domaine des mobiles, où il est distancé par des géants comme Vodafone AirTouch.

Des obstacles politiques

Pour réussir ce rapprochement, Deutsche Telekom devra réussir à contourner certains obstacles. Le principal vient de l’opposition de certains sénateurs américains. Le sénateur Ernest F. Hollings, de Caroline du Sud, a en effet présenté un projet de loi qui vise à empêcher les opérateurs téléphoniques détenus à plus de 25 % par un gouvernement étranger d’acquérir un opérateur américain.
Les opposants américains feignent d’ignorer le mouvement de dérégulation qui est en marche en Europe depuis quelques années. Cette dérégulation a, de fait, largement profité aux opérateurs télécoms américains : WorldCom, BellSouth, etc. Du côté de Deutsche Telekom, on rappelle qu’à l’issue du rachat, la part du gouvernement allemand tomberait de 58 % à 45 %.Quant à la Commission européenne, elle devrait exprimer officiellement son avertissement dans une lettre à la déléguée américaine au Commerce extérieur, Charlene Barshefsky. ” Il est clair qu’en cas d’adoption, cette politique aura des conséquences au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) “, explique Michael Curtis, porte-parole de la Commission. Il s’est refusé à toute autre précision.
Michael Curtis commentait des informations parues dans le Financial Times de samedi qui citait un responsable de la Commission européenne à Washington expliquant que l’Union européenne pourrait retirer ses engagements en matière de télécoms vis-à-vis de l’OMC, si le projet de loi américain se concrétise. En cas de difficultés, l’Allemagne pourrait, elle aussi, porter plainte devant l’OMC.

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Pierre Bouvier