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Des libraires sans catalogue ?

Après son rachat par France Télécom, fin 1999, le libraire Alapage a décidé d’abandonner la location de sa base de données, clé de voûte des catalogues des libraires. Pour ses anciens clients ?” la plupart des libraires en ligne, Fnac.com en tête ?”, il s’agit de trouver un autre fournisseur.

Pour Juan Pirlot de Corbion, directeur général de Chapitre.com, cet événement n’est au pire qu’une péripétie. Car, même si l’offre de cette société repose essentiellement sur l’exhaustivité de sa base (plus de 650 000 livres et 200 partenariats avec des libraires pour les livres rares), il existe d’autres catalogues que celui d’Alapage. Aussi le créateur de la start-up mise-t-il plus sur la quantité de ses ressources de livres anciens ou épuisés que sur l’offre commune aux autres marchands. 30 % des 10 millions de francs de chiffre d’affaires du site sont réalisés dans cette catégorie. Un chiffre d’affaires que Juan Pirlot de Corbion entend faire évoluer à 50 millions de francs en 2000, grâce au nombre de visiteurs toujours plus élevé (aujourd’hui 120 000 par mois) et à un taux de fidélisation record de un client sur quatre.Amazon, qui devrait prochainement s’installer en France, ne profitera pas de l’effet du premier entrant qui fait encore sa force aux Etats-Unis. Le numéro un américain du commerce électronique va recourir à Dilicom, base de données coopérative complète mais assez succincte. Il lui reste donc à développer tout le contenu éditorial : résumé du livre, image, etc. Le libraire Decitre a mis en ?”uvre une autre solution : “Avec quelques millions et une bonne équipe, il n’y a pas de difficultés à créer sa propre base. De toute façon, je ne pense pas que les clients d’Amazon s’intéressent aux fonds de catalogue. Les nouveautés seront largement suffisantes”, répond Philippe Savereux, directeur marketing de Decitre.Une tactique adoptée par la Fnac pour son nouveau site. L’enseigne a profité des forces vives apportées par SFL-Alibabook, achetée en mai 1999, pour se créer sa propre base de données. Il existe donc désormais un terrain économique que peut occuper une société éditrice de catalogue.Du Minitel à InternetPour Electre, filiale du Cercle de la librairie, la place libérée par Alapage pourrait servir de prétexte pour l’aider à repenser son modèle économique, qui jusque-là reposait principalement sur ses revenus issus du Minitel. La société pourrait enfin rattraper son retard au démarrage de l’Internet. Pour l’heure, la direction d’Electre se refuse à tout commentaire, en concédant toutefois ne pas se désintéresser du potentiel offert par Internet. Reste une difficulté : trouver un modèle économique aussi rentable que sur Minitel, lequel, même s’il croît encore légèrement, commence à ressentir la pesanteur du marché.Les dirigeants avouent du bout des lèvres prévoir quelques annonces lors du Salon du livre, qui se tiendra à la fin du mois de septembre prochain. On peut tout à fait imaginer que certaines sociétés louent gratuitement leur base de données, en se rémunérant uniquement sur les achats réalisés sur les sites de leurs clients professionnels. L’idée reste en suspens. Elle n’a en effet toujours pas été validée par un quelconque acteur. Le risque de voir de nouveaux concurrents ?” à modèles de location de base payante ?” arriver sur ce marché ne peut être évité que par un contenu éditorial toujours plus riche et par une gestion quotidienne de la remise à jour de la base.Un développement coûteux lorsque, comme les librairies Decitre, le catalogue est riche de 450 000 titres et de 150 000 images et textes. Decitre a pourtant trouvé la parade en profitant du lancement de BOL France (www.bol.fr) pour faire cofinancer son projet. En contrepartie, car il en fallait une, la librairie est liée à BOL par un contrat d’exclusivité qui l’empêche de commercialiser sa base auprès d’autres sites marchands. Avec 14 millions de francs de chiffre d’affaires en ligne en 1999, soit 7 % du chiffre d’affaires de Decitre (200 millions de francs en 1999), le site a ainsi réussi à tirer son épingle du jeu. Et ce, même si sa base été critiquée pour des dysfonctionnements pendant les six mois qui ont suivi le lancement de Bol.fr.Un modèle gagnant au vu des résultats, d’autant plus que son site marchand ne s’est lancé qu’en octobre 1998, et qu’il ne s’est ouvert au monde professionnel qu’en décembre dernier, alors que 50 % des résultats globaux de Decitre sont obtenus auprès de cette clientèle. Quant à Alapage, il mise désormais uniquement sur un système d’affiliation permettant aux membres de son réseau de se rémunérer entre 5 % et 7 % du montant de chaque commande effectuée par leur site. Et c’est ce revirement stratégique, accompagné d’un développement international soutenu (déjà la Grande-Bretagne et bientôt l’Espagne), qui devrait permettre à Alapage d’atteindre les 100 millions de francs de chiffre d’affaires en 2000, contre 20 millions de francs lannée dernière. Déjà, 30 % de cet objectif ont été générés par les sites affiliés.

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La rédaction