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” De l’e-mature à l’e-responsable “

C’est un article que j’ai porté en moi au printemps 2000. J’en avais trouvé le titre : ” Le marché de l’e-mature “. Mais, chaque fois,…

C’est un article que j’ai porté en moi au printemps 2000. J’en avais trouvé le titre : ” Le marché de l’e-mature “. Mais, chaque fois, je remettais le métier sur l’ouvrage. Car, si j’étais sûr de la conclusion, je peinais à structurer mon discours tant ce marché était mouvant. Et, finalement, j’y ai renoncé.Pourquoi vous entretenir de cet article mort-né ? Pour prendre acte du fait que l’euphorie exagérée qui a présidé, au début de l’année 2000, à l’émergence de ce qui a été baptisé ” nouvelle économie ” ferait plus de mal, à terme, que de bien.En effet, à écouter les discours qui prévalaient à cette époque, il fallait tourner le dos aux fondamentaux de l’économie, oublier les règles de la saine gestion… On ne vantait que ces jeunes entrepreneurs créant de la richesse à partir de rien sur des concepts flous, et dont la faisabilité n’avait pas été validée. Nous étions entrés dans l’ère des ” si ” : si le marché se développe, si le comportement des internautes allait dans le bon sens, si l’idée ingénieuse n’était pas pillée, si je sortais une version opérationnelle ” blindée “, si… Cette rengaine en si a conduit à la formation d’une poche d’air par ceux qui brassaient du vent, et cette poche s’est gonflée jusqu’à son éclatement ! Soudain, changement de discours ! Ces jeunes loups devenus des gestionnaires dispendieux et inconséquents en étaient réduits, pelés et maléfiques, à ” faire la manche ” auprès de leurs bailleurs de fonds devenus sourds. C’est le réveil brutal avec la réaffirmation de truismes – les règles du marché s’appliquent à la nouvelle économie, la mortalité infantile des entreprises en création est une loi universelle, les clients sont exigeants… -, ponctuée d’un “votre affaire ne sera rentable que dans deux à trois ans, mais je n’y mets plus un sou !”.Nous pourrions poursuivre longtemps cette litanie, car les exemples abondent. Mais nous préférons nous focaliser sur l’irresponsabilité et l’irréalisme des grands acteurs du marché. En effet, ces professionnels sérieux jouent habituellement le rôle de modérateurs ou de régulateurs. Et, par la pertinence de leurs analyses, ils nous apportent le recul nécessaire. Or, ils se sont mis à rêver comme des gamins en mélangeant réel et imaginaire. Ou – pire encore -, aveuglés par l’appât du gain, ils ont perdu tout sens critique. Ces gens-là sont doublement fautifs. Ils sont fautifs en première instance d’avoir entraîné de jeunes créateurs dans des entreprises à la viabilité problématique. Oui, il fallait investir dans la nouvelle économie. Oui, il fallait porter quelques idées folles. Mais pas tout et n’importe quoi. Ils sont donc fautifs d’avoir poussé à l’aventure des béotiens démunis. Mais leur brutal revirement les rend doublement fautifs. A passer de trop de laxisme à une sévérité outrancière, ils assassinent de jeunes pousses encore fragiles, mais porteuses d’avenir. C’est ce qui se produit avec certaines start up viables mais encore déficitaires, que leurs bail-leurs abandonnent comme certains jettent à la mer leurs passagers clandestins après avoir encaissé le prix du passage !Nous baignions dans l’euphorie présidant à l’émergence du net. C’était le marché de l’e-mature ! Ne le regrettons pas, car une bouffée de fête est toujours bonne à prendre. Mais, l’excitation retombée, voici revenu le règne des pisse-froid, qui condamnent ceux qu’ils ont portés sur les fonts baptismaux. Oui, ceux-là, je les juge e-responsables et les livre à votre vindicte.

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Jean Thily