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Dans les coulisses de l’usine des puces à double c?”ur d’AMD

Visite de la toute nouvelle fabrique d’AMD où sont produits les processeurs ultramodernes du fabricant, au c?”ur de la ‘ Saxony Valley ‘.

En ce jour ensoleillé du 14 octobre 2005, Gerhard Schröder est en visite à Dresde, dans l’est de l’Allemagne. Il n’est pas là pour la cathédrale fraîchement rénovée, mais pour inaugurer la nouvelle fabrique de
processeurs ultramodernes d’AMD. ‘ L’un des investissements les plus importants effectués en Allemagne au cours des dix dernières années. Un signal fort, qui démontre que le pays reste
attractif ‘,
se félicite le chancelier. AMD a investi près de 2,5 milliards dans la construction d’une nouvelle usine.En quelques années, le fondeur a créé environ 7 000 emplois directs et indirects en Saxe et dans les régions voisines. Et contribué ainsi à faire de Dresde le centre européen de l’innovation en matière de
semi-conducteurs. A tel point que la région est désormais surnommée la Saxony Valley, en référence à la Silicon Valley californienne. Les aides incitatives des gouvernements allemand et américain ont encouragé l’installation du fondeur dans
la région. D’autres firmes high-tech se sont installées en Saxe allemande, comme Infineon ou ZMD.

Le diamètre des wafers passe à 300 millimètres

Baptisée Fab 36 car créée 36 ans après la naissance d’AMD, cette usine aura été construite en deux ans sur le site de la Fab 30. Un exploit d’autant plus remarquable que cette dernière a continué de produire au même
rythme qu’avant. Pour sa part, la Fab 36 bénéficie des dernières avancées technologiques. C’est ainsi la première des trois usines du fondeur à être conçue pour la fabrication de semi-conducteurs sur tranches de silicium (aussi
appelées wafers) de 300 millimètres de diamètre ?” soit une surface deux fois et demie supérieure à celle des wafers actuels. Ce qui produit davantage de processeurs.L’augmentation de la taille des wafers va de pair avec la réduction des dimensions des constituants élémentaires des processeurs : les transistors. Leur longueur, exprimée en nanomètres (un milliardième
de mètre), est en constante diminution. La loi de Moore, selon laquelle la densité de transistors dans les processeurs double tous les deux ans, ne se dément pas depuis quarante ans. La gravure sur les wafers doit
s’adapter et gagner en finesse. Elle est passée récemment à 90 nanomètres.La Fab 36 devrait sortir ses premiers processeurs gravés à cette taille d’ici au premier trimestre de l’année prochaine. Et en fin 2006, l’usine commencera à produire des puces gravées en 65 nm. AMD
s’est fixé pour objectif d’avoir fait migrer de façon substantielle la Fab 36 vers le 65 nm d’ici à la mi-2007. Au-delà, cette même usine devrait aussi mettre en route la production de processeurs en 45 et 32 nm. Cette
miniaturisation est tout indiquée pour l’élaboration des puces multic?”urs, plus gourmandes en transistors.

Un procédé unique de fabrication

Les secrets de fabrication restent bien gardés, mais la visite de l’usine révèle un concentré de technologies récentes. L’usine met en ?”uvre un procédé de fabrication automatisée unique, baptisé APM
(Automated Precision Manufacturing), breveté lors de la création de la Fab 30. C’est la troisième génération du procédé qui est mise en place dans la Fab 36. Des machines spéciales ?” semblables aux cabines
téléphériques des stations de ski ?” effectuent des opérations habituellement réalisées par les ingénieurs dans les salles blanches ?” qu’il s’agisse de prendre le wafer dans les stocks ou de
le placer sur la machine qui le gravera.A cette galette de silicium d’environ 1 mm d’épaisseur s’appliquent toute une série d’étapes ?” on en dénombre jusqu’à 500 ?” définies par l’APM. Certaines sont
répétées plusieurs fois. Dans les grandes lignes, des dépôts (ou implantations) sont réalisés à la surface du wafer, puis recouverts de résine photosensible. Un motif ?” en quelque sorte, le dessin des briques de base
du processeur ?” est transféré d’un masque optique (une sorte de pochoir) vers cette résine par lithographie optique. Ensuite, ce motif est transposé par gravure à la couche déposée. Un nouveau dépôt peut être réalisé et un nouveau
cycle dépôt-lithographie-gravure peut recommencer.Les premières étapes assurent les dépôts de semi-conducteurs et d’isolants constituant les transistors. Les dernières définissent les interconnexions entre les blocs du processeur.

Un isolant intégré qui fait la différence

L’automatisation de ces tâches présente de nombreux avantages. Elle réduit les risques d’erreur et améliore la productivité, même si AMD ne publie aucun chiffre. Elle simplifie aussi les changements de processus. Ceux-ci
surviennent, par exemple, lors d’une réduction de la taille de la gravure ?” par exemple, quand la Fab 30 est passée de 180 à 130 nm en 2002, puis à 90 nm en 2004. AMD ne se démarque pas de ses rivaux par les seuls
processus de fabrication.Il se distingue d’Intel d’abord par le choix du matériau de base des wafers. Il a opté pour un substrat de silicium particulier, appelé SOI (Silicon on Insulator). Sa
particularité : un isolant intégré entre la couche de silicium actif ?” sur laquelle seront ensuite gravés les transistors ?” et la couche de substrat de silicium, servant de support mécanique. Cet isolant réduit les
parasites comme les courants de fuite, augmentant ainsi les performances et réduisant de façon drastique la consommation d’énergie. Ce dernier point contribue au succès des processeurs actuels d’AMD.Les serveurs restent de plus en plus concentrés dans les salles informatiques, générant de forts dégagements de chaleur, susceptibles d’engendrer des dysfonctionnements, voire de faire fondre certains composants. L’une des
solutions consiste alors à réduire la consommation énergétique des processeurs. Ce qu’AMD a réussi à réaliser grâce à SOI. Par ailleurs, l’isolation des transistors accroît aussi la densité des circuits intégrés, et participe donc au
final à la réduction des coûts. L’un des autres atouts, non négligeables, de SOI est d’être compatible avec les technologies CMOS (Complementary Metal-Oxide Semiconductor) actuelles.AMD utilise depuis longtemps la technologie SOI. En effet, il l’a étrennée lors de la fabrication de son Athlon de deuxième génération. IBM, de son côté, travaille dessus depuis une quinzaine d’années
 ?” justement pour repousser les limites du transistor MOS en matière de capacitance (sa vitesse). Pour l’heure, Intel n’envisage pas d’adopter le SOI à moyen terme.

Le français Soitec détient 80 % de parts de marché

En matière de SOI, seul Soitec est aujourd’hui capable de fournir ce type de matériau en volume. Cette société française basée à Grenoble domine le secteur avec 80 % de parts de marché en 2005. Elle dispose d’une
technologie unique, sorte de boîte à outils de précision, baptisée Smartcut, qui autorise la fabrication industrielle de plaques SOI.Ainsi, AMD ne faillit pas à sa réputation d’innovateur et de challenger en se démarquant sur toute la ligne. En ces temps où le fondeur numéro deux du marché a le vent en poupe avec des résultats plus qu’encourageants
(croissance de 44 % des ventes au troisième trimestre de cette année), la Fab 36 est l’outil de pointe indispensable pour gagner des parts de marché sur son concurrent Intel. Selon AMD, la nouvelle usine devrait doubler sa capacité de
production, passant ainsi de 50 à 100 millions d’unités d’ici à 2008. La Fab 36 devrait entamer sa production dès le début de l’année prochaine.AMD s’attend à une accélération des ventes de processeurs de l’ordre de 42 à 50 %. La Fab 30 l’avait rendu crédible face à son imposant rival. La Fab 36 l’aidera peut-être à dépasser le numéro un. Sans
doute pas au niveau des volumes de production, mais au moins en termes de performances des processeurs.

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Kareen Frascaria