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‘ Dans 10 ans, dans les campagnes, tout le monde n’aura pas la radio numérique ‘

Le passage au numérique pose le problème de la réception des radios locales et associatives. La radio bretonne Littoral AM fait le bilan de ses propres expérimentations. Explications.

Et si avec la radio numérique certains auditeurs ne recevaient plus de radio du tout ? C’est ce que craignent certaines stations, mettant en cause la norme T-DMB retenue par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) dans son
appel à
candidature adressé aux radios qui veulent passer à la diffusion numérique.En parallèle, une autre norme a été retenue par les pouvoirs publics pour la bande AM (modulation d’amplitude), le DRM (Digital Radio Mondiale). Mais là, pas d’appel à candidature. Or, certaines radios lui trouvent un plus grand
intérêt. Explication de Stéphane Hamon, cofondateur de Littoral AM en Bretagne qui a testé cette norme.01net. : Littoral AM a expérimenté une diffusion numérique en DRM en 2008. Quel en est le bilan ?


Stéphane Hamon : Le test a duré du 21 évrier au 30 juin 2008, avec une fréquence, un émetteur, mais le CSA ne l’a autorisé qu’à condition d’une puissance de diffusion limitée. Cela nous a quand même
permis de couvrir plus de la moitié de la Bretagne. La qualité sonore est meilleure [qu’en analogique, NDLR] et nous pouvions afficher des données sur écran (cartes météo, pochettes de disques, etc.).


Nous sommes en zone rurale, mais nous avons pu parcourir 150 kilomètres sans perdre la radio. Au fin fond des campagnes, on captait encore. Nous avons fait aussi des tests plus incongrus, pendant de violents orages ou dans le TGV. A
chaque fois, la diffusion a tenu.Beaucoup de petites radios craignent les coûts induits par la radio numérique avec la norme T-DMB. Qu’en est-il pour vous avec le DRM ?


On n’a pas
les problèmes financiers que causeront le T-DMB : avec 2 000 euros par mois [contre plusieurs dizaines de
milliers d’euros nécessaires pour la diffusion en T-DMB, NDLR],
nous couvrions 2,3 millions de personnes, soit un plus grand territoire pour moins cher ! Contrairement au T-DMB, nous n’avons pas à intégrer un groupement de
radios [un multiplexeur, NDLR] et à payer un prestataire technique. Nous sommes complètement décisionnaires et libres.D’autres tests sont-ils prévus ?


Non, nous avons eu ce que nous voulions en termes de données techniques et le CSA a notre dossier [synthèse disponible sur le site de
Littoral AM,
NDLR] . Nous sommes prêts à investir dans un émetteur et à diffuser dans six ou huit mois. Mais pour cela, il faut que le CSA lance un appel à
candidature pour la radio numérique en DRM.Craignez-vous qu’à terme, certains habitants soient privés de radio ?En Bretagne, la première phase de déploiement de la radio numérique va concerner d’abord Rennes et Brest. A 15 kilomètres de ces villes, vous ne recevrez plus la radio numérique. Or, On ne sait pas si les futurs récepteurs
numériques pourront encore capter l’analogique.


Ensuite, pour les petites villes, il y aura quatre ou cinq ans d’attente. Mais dans dix ans, dans les campagnes, des gens n’auront toujours pas la radio numérique. Car pour la déployer en T-DMB dans les zones rurales, il faut des
infrastructures techniques, des antennes et des relais tous les 15 ou 30 kilomètres. Ça pose un problème d’investissement. Qui va payer ? Bien sûr, on peut imaginer d’utiliser les réseaux des opérateurs mobiles, mais les éditeurs
devront les payer. Et si c’est pour desservir une poignée d’auditeurs sur quelques kilomètres carrés, certains pourraient se demander si ça vaut le coup.

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Propos recueillis par Arnaud Devillard