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Coupable!

En conservant son statut de monopole par des moyens anticoncurrentiels, en tentant de se bâtir un monopole sur le marché des navigateurs Web et en liant illégalement navigateur Web et système d’exploitation, Microsoft a violé les lois antitrust Sherman.

Au bout de quatre mois de réflexion, le juge Thomas Penfield Jackson vient de rendre son verdict, en accord avec vingt-trois des vingt-six griefs reprochés par le département de la Justice et dix-neuf Etats américains. Cette décision fait suite à un raisonnement extrêmement fouillé du magistrat.Définissant le marché où Microsoft exerce son monopole comme celui des ” systèmes d’exploitation pour PC compatibles Intel “, il explique que, très tôt, l’éditeur a su identifier deux ” chevaux de Troie ” capables de menacer son hégémonie : Java et Navigator. Microsoft a alors poussé les développeurs à ignorer ces deux nouvelles interfaces, en utilisant des moyens illégaux au regard de sa position de monopole.

Contrôle et pressions

L’éditeur a ainsi engagé un effort massif pour contrôler les deux principaux canaux de distribution d’un navigateur : la pré-installation par les fabricants de PC et l’intégration dans l’offre des fournisseurs d’accès à Internet. Par des moyens contractuels et techniques, l’éditeur a lié Internet Explorer (IE) et Windows, interdisant tout autre choix aux fabricants de PC. Alors que la compagnie était bien consciente qu’IE n’était pas notablement meilleur que ses concurrents.Restait un obstacle pour le juge Jackson : la décision, en 1998, d’une cour d’appel fédérale jugeant légale l’intégration d’IE au sein de Windows 95. Décision qu’il balaye poliment du revers de la manche, la qualifiant d'” incohérente face aux précédents jugés par la Cour suprême “. Plus que les détails technologiques, le magistrat juge que, en réalité, ” les consommateurs perçoivent système d’exploitation et navigateur comme des produits séparés, pour lesquels existent des demandes distinctes “. Et de rappeler que Microsoft est la seule société à refuser de vendre un système d’exploitation sans navigateur.

Pratiques industrielles injustifiables

Les fournisseurs d’accès à Internet se sont vu, eux, imposer des conditions drastiques : même en faisant uniquement la promotion d’IE, un fournisseur, dont le pourcentage de clients utilisant Navigator se révélerait supérieur aux clauses du contrat, subirait de lourdes pénalités. Du côté de la menace Java, Microsoft a poussé les développeurs à utiliser ses propres outils et leurs extensions propriétaires, a fait pression sur Intel pour qu’il ne collabore pas avec Sun et a contraint les éditeurs à utiliser les machines virtuelles Java maison.Des pratiques injustifiables d’un point de vue industriel : ainsi, Microsoft n’a jamais pensé pouvoir rentabiliser les frais investis dans la promotion d’Internet Explorer. Seule importait la possibilité de mettre à genoux un concurrent dangereux.Unique point positif pour l’éditeur, le magistrat considère que les contrats de Microsoft n’empêchent pas totalement Navigator d’être accessible par les utilisateurs. Mais l’abus de position dominante ayant permis à léditeur de se bâtir un monopole sur le marché des navigateurs est, lui, constaté. Et entraînera des sanctions que le juge Jackson déterminera dans les prochains mois.

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Ludovic Nachury