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Compatible ? Qui ça ? Avec quoi ?

L’informatique entretient quelques mythes persistants. Le plus tenace ? Celui de la compatibilité. Le mot fleurit dans les discours marketing. Après quelques secondes d’espoir, on reprend ses esprits : la compatibilité, plus on en parle, moins il y en a. Que l’éditeur ou le constructeur qui sait prouver le contraire me jette le premier octet.

Les lendemains d’anniversaire, on a la tête lourde. Lourde de vapeurs diverses et d’idées mal digérées. Ces 20 ans du PC, quelle blague ! La promesse d’une micro-informatique standardisée a fait long feu. Vous vous souvenez ? Dès 1982, on classait les clones de PC par degré de compatibilité. Ça donnait, dans les revues spécialisées, des titres du genre : ” Le nouveau Trognon PC XT Turbo compatible à 99 %. ” La pratique a enflé, puis disparu, dès qu’IBM a renoncé à verrouiller le marché. On était content après. On achetait un compatible PC de chez n’importe qui et n’importe quel logiciel tournait dessus. Drôlement chouette !Sauf quand on cessait de s’intéresser au PC et qu’on se penchait sur la carte graphique. Là, c’est Hercules qui dictait sa loi. Une sacrée carte, la carte Hercules, avec plein d’imitateurs plus ou moins doués. Et les modems, quelle partie de rigolade les modems ! Hayes avait inventé un super langage pour contrôler ces boîtiers, les commandes Hayes. Fallait voir comment les concurrents interprétaient lesdites commandes dans leurs appareils. Même les casse-têtes chinois, à côté, c’était de la gnognotte.Les constructeurs ont depuis mis un peu d’ordre là-dedans. Enfin, à condition de ne rien vouloir changer à la super config’ telle que livrée. Sinon, on plonge dans l’enfer des pilotes. Ces satanés bouts de code suffisent à faire tourner chaque périphérique sur n’importe quel PC, selon les constructeurs. Les hot lines de tous les pays savent combien c’est faux. Ça marche quand ça veut… ou quand ça peut. Encore faudrait-il que les systèmes d’exploitation soient d’équerre pour que ça colle. Sur PC, il y a de quoi douter. Un fournisseur, en position de quasi monopole, diffuse un paquet de versions différentes de son OS, toutes plus incompatibles les unes avec les autres.Oubliez un instant que vous êtes un fin connaisseur des arcanes de la micro. Vous trouvez ça compréhensible qu’il existe des versions différentes d’un même logiciel juste parce que le suffixe accolé à Windows change ? Et les formats de fichiers de la suite bureautique Office, vous en connaissez toutes les variantes ? Ne comptez plus ! Repartez plutôt en balade au pays des Techno-Crétins, là où règne en maître la société Macro-Presse. La fable de Roberto di Cosmo n’a pas pris une ride.Mais les démons du monopole logiciel ne chatouillent pas que Microsoft. Prenons Sun, au hasard, et son Java. Ah ! Java ! quelle belle promesse : un langage universel qui garantirait qu’une application tourne sur toute machine dotée d’une Java Virtual Machine ad hoc. Ne cherchez pas, ça n’existe pas ! HyWebMap, projet on ne peut plus sympathique, préfère le JDK 1.1.8. Hushmail, le seul webmail crypté, impose le JDK 1.3… et ne marche pas sur Mac. Alors, on fait comment pour utiliser les deux en même temps ? On achète deux PC ?Et avec ça, Internet plonge lui aussi dans l’incompatible. Malgré les W3C et autres IETF, le Web se constitue en une multitude de zones privatisées. Surfez sur quelques sites comme ceux de Netscape ou Microsoft avec différents navigateurs, sur Mac et sur PC. L’expérience parle d’elle-même : c’est lentropie en pleine action. Au secours !

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Michaël Thévenet