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Compacts à grand capteur : tout savoir sur les appareils photo préférés des puristes

Un vrai capteur et une vraie optique de qualité reflex dans un format compact : c’est ce qu’offre la niche des compacts experts à grand capteur. Une niche pour photographes exigeants et pointus.

A contre-courant de la miniaturisation à outrance, de la course aux zooms toujours plus puissants et autre « convergence photo/vidéo », nous allons vous parler de boîtiers de puristes. Cette catégorie cible le clan des  « conservateur » qui pratiquent la photo « à l’ancienne ». Pour les différencier des compacts experts « classiques », nous les appellerons « compacts à grand capteur », formule simplifiée de la version « compacts à grand capteur et focale fixe » encore plus lourdingue mais techniquement plus juste. Passons.

À lire : Le top 10 des meilleurs appareils photo compacts experts (juin 2016)

Marginaux jusqu’à l’arrivée du premier Fujifilm X100 en 2011, les compacts experts à grand capteur fleurissent… doucement. Dans un marché où les volumes de ventes de compacts se sont effondrés, l’heure est à la mesure. Une mesure qui n’empêche pas les constructeurs d’affirmer leurs gammes. La raison est simple : dans un monde saturé d’images, ces boîtiers exigeants ont des atouts pour produire des clichés qui sortent du lot et séduisent de plus en plus les photographes prêts à mettre le prix. Ces appareils sont en effet onéreux, mais ils ont de solides arguments. A commencer par leur capteur.

Les atouts d’un grand capteur

La caractéristique première de ces appareils est la grande taille du capteur par rapport aux petits capteurs des smartphones. Les dimensions vont de l’APS-C, comme sur les reflex grand public au capteur plein format dit 24×36 des reflex professionnels. Soit des surfaces très largement supérieures à celles des smartphones et autres compacts numériques. Et même toujours largement supérieures à celles de compacts experts équipés du fameux « grand » capteur 1 pouce – voir le tableau de comparaison des surfaces ci-dessous.

La première des forces d’un grand capteur, c’est l’espace : il peut au choix accueillir plus de pixels (gain de définition d’image) ou offrir plus de surface à chacun des pixels. En règle générale, les constructeurs tapent au milieu et proposent des définitions intermédiaires (16-24 Mpix) qui offrent un bon compromis entre définition et performances. Car plus un pixel est grand, plus il reçoit précisément les informations, plus l’image est détaillée et dépourvue de bruit numérique. Précision d’image et performances en basses lumières sont parmi les premiers éléments que recherchent les photographes qui choisissent ce genre de boîtier.

A ces performances générales s’ajoute une caractéristique physique qui agit comme un coup de pouce à la création : plus une surface photosensible (film ou capteur) est grande, plus sa zone de netteté est étroite. Un avantage clé pour isoler un sujet et le mettre en valeur – on pense bien sûr aux portraits, aux photos de détails très « éditorialisées ». Le module caméra principal de l’iPhone 7 a beau ouvrir à f/1.8, sa zone de netteté est bien plus large que le Leica Q pourtant équipé de la même focale (couverture angulaire) du fait de son tout petit capteur.

Sans verre un capteur n’est rien et pour tirer la quintessence de ce composant, les compacts experts à grand capteur profitent aussi d’un élément clé : une optique haut de gamme.

Optiques de qualité

En photographie, il vaut mieux un capteur moyen et une bonne optique qu’un capteur excellent et une optique bas de gamme. Si les performances d’un capteur peuvent brider la qualité d’image dans certaines situations, la qualité optique la limite dans TOUS les cas de figure. Plus chers, plus exclusifs et destinés à un public (théoriquement) plus averti que le citoyen lambda, le compact expert à grand capteur profite toujours d’un bloc optique de bonne qualité.

Il ne s’agit pas uniquement de luminosité – la valeur notée f/ – même si l’écrasante majorité de ces boîtiers ouvre au minimum à f/2.8, mais il s’agit bien de formules optiques éprouvées et de lentilles de qualité. Destinés à être facilement transportables (« compacts »), les compacts experts à grand capteur ne disposent pas des optiques les plus lumineuses (f/1.8 et au-delà) afin de limiter l’encombrement mais aucune d’entre elles – aucune – n’est médiocre. Le niveau de piqué est généralement très bon, les défauts optiques rares et contenus (vignetage, aberrations chromatiques, déformations).

La qualité de ces optiques et leur luminosité leur permettent de délivrer des clichés impossibles à réaliser avec un smartphone. Même si du point de vue de la focale, les compacts experts à grand capteur et les téléphone ont quelque chose en commun.

Focale fixe, ou zoome avec tes pieds

Si vous êtes un novice en photographie et que vous avez poursuivi la lecture jusqu’ici, abordons la seconde originalité de ces appareils : la focale, c’est à dire la couverture angulaire (le champ de vision pour faire plus simple) est fixe. Ici point de zoom : pour voir plus large, il faut reculer, pour capturer un détail, il faut s’approcher. Les photographes disent volontiers qu’avec une focale fixe, « le zoom, c’est tes pieds ! ».

Les limites d’un appareil à focale fixe inamovible sont claires : on se contente de ce qu’on a et puisque la majorité des focales oscillent entre 28 mm et 35 mm (sauf Sigma, voir plus bas), on fait une croix sur les longues focales capables de capturer les détails des gargouilles de Notre-Dame comme sur les ultras grand-angle pour paysages. A la fois figée et fixe, l’optique de ces compacts experts impose une double limite qu’il faut accepter et dépasser. Mais le bon côté de la chose, ces que ces contraintes apportent, heureusement, certains avantages non négligeables

En premier lieu, la qualité optique, capitale dans ce genre d’appareil comme on l’a vu. Les zooms nécessitent plus de lentilles, sont plus complexes à concevoir et imposent d’importants compromis entre l’encombrement, la luminosité et la qualité optique (qui ne vont pas nécessairement de pair, soit dit en passant). Face aux zooms, les focales fixes ont le double avantage de ne pas être soumises à toutes ces contraintes, en plus d’être, dans la tête des ingénieurs, destinées à un public de connaisseurs (à tort ou à raison). De ce fait, les optiques des compacts experts à grand capteur sont au pire, bonnes, au mieux, excellentes.

Vient ensuite la compacité. Puisque qu’il n’y a pas de changement de la couverture angulaire, il y a moins de lentilles à déplacer, ce qui réduit de facto l’encombrement de la majeure partie des focales fixes classiques grand angle – il en va un peu autrement des téléobjectifs, mais ils ne sont pas représentés dans les compacts.

A ces arguments techniques s’ajoute un autre élément de poids, au regard de l’aspect créatif que revêt un appareil photo : l’ergonomie.

Outil de corps et de cœur

A la façon d’un sculpteur sur bois qui aime les ciseaux qui lui permettent, tel le prolongement de ses mains, de donner vie à une bûche, le photographe peut aimer – voire aller jusqu’à vénérer – cette boîte magique qui lui permet de faire rentrer un instant du réel dans un cadre. Le caractère mono tâche d’un appareil photo – il fait des clichés et c’est tout – s’oppose d’autant plus au smartphone que le boîtier offre commandes, boutons, molettes et leviers destinés à faciliter la prise de vue. Et il permet toutes les fantaisies : quand le smartphone fait la majorité des choix tout seul, l’appareil photo donne plus de champ à l’interprétation du photographe. Et sa prise en main en fait une machine « de corps et de cœur », outil physique dont on apprend à reconnaître la position des boutons par la simple mémoire des mains.

L’évaluation de l’ergonomie d’un appareil est pour tout le monde un vrai casse-tête : si quelques arguments objectifs permettent d’orienter une argumentation, la grande diversité des profils de photographe peut faire éclater vos certitudes. Le viseur : obligatoire ou pas ? Ça dépend des usages et des goûts. L’écran doit être tactile et orientable ? Pour nous oui, mais nous avons reçu des opinions inverses.

28 ou 35 mm ?

Mis à part le cas des Sigma DP Quattro dont nous parlerons plus loin, l’offre en compacts experts en grand capteur se limite à 5 modèles et seulement deux focales : 28 ou 35 mm. Pourquoi ? Parce que ce sont des couvertures angulaires généralistes, idéales pour la photo de rue et le reportage.

En 28 mm nous retrouvons le Fujifilm X70, le Leica Q et le Ricoh GR II. Le X70 et le GRII jouent dans la même cour avec leur capteur APS-C, leur ouverture de f/2.8 et leur format extrêmement compact – ils tiennent dans une poche de jean (pas slim). Plus cher, le Leica Q fait le choix d’un encombrement plus important – c’est un genre de petit Leica M – mais il profite d’un capteur plein format 24×36 et d’une optique plus lumineuse puisqu’elle ouvre à f/1.7.

En 35 mm nous avons droit à deux modèles, le Fujifilm X100T/F et le Sony RX1R Mark II. Deux appareils assez antagonistes puisque le X100F (et ses prédécesseurs les X100, X100S et X100T) fait le choix d’un format de boîtier rétro, pas trop miniaturisé et d’un capteur APS-C quand le RX1R Mark II, pourtant équipé d’un capteur plein format 24×36 plus grand, joue la compacité à tout prix. 

Entre 28 mm et 35 mm, que choisir ? Un viseur ou pas ? Pocket à tout prix ? Et quid de la disposition des commandes : style rétro à la Fuji ou moderne à la Sony ? Comme nous tenons à la vie, nous ne répondrons pas à cette question, craignant trop l’ire du photographe acariâtre qui ne jure que par SON boîtier et SA vision. Il s’agit ici un peu d’usages, mais beaucoup de goût. Entre 700 et 4000 euros pour un boîtier à focale fixe, on n’est pas dans l’achat raison mais bien dans l’achat passion. Le meilleur des services que nous puissions vous rendre étant d’aller prendre ces boîtiers en magasin, de les tester et de vous faire votre propre opinion.

Ce qui ne nous empêche pas de vous donner ci-dessous la carte d’identité de chaque boîtier et nos avis de test !

Le choix en 28 mm

Ricoh GR II, roi de l’ergonomie

À lire : Test : Ricoh GR II, sans innover ce compact expert reste toujours aussi efficace

Peu connu en France, Ricoh est célèbre au Japon pour ses GR argentiques puis numériques, des boîtiers de poche à l’excellente qualité optique. Ricoh a peaufiné son savoir-faire depuis des années et propose l’ergonomie matérielle la plus efficace de la compétition – tous modèles et toutes marques confondues. Bien maîtrisé, un Ricoh GR ou GR II se pilote à une seule main. Sa capacité à fixer le focus à une certaine distance (mode « snap ») est un vrai plus dans la photo de rue

Fujifilm X70, compact et moderne

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Joli, le X70 est un clone de GR en plus robuste – l’optique n’a pas à se déployer – et en plus moderne dans l’approche de l’écran – contrairement au GR, il permet de faire des autoportraits. La qualité de construction est très bonne, la qualité d’image itou puisque la plateforme technique est issue des X100 (même capteur que le X100T). Mais l’ergonomie est un petit cran en-dessous.

Leica Q, ADN de M

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Certains photographes ont passé leur vie avec un Leica M et un 28 ou 35 mm. Leica (avec Panasonic) a fait le choix du 28 mm pour son premier compact à capteur plein format. Et offre dans un format plus compact, la qualité d’un M et d’un Summicron 2/28 pour un tarif inférieur (à f/1.7, l’optique est trop molle, il ne faut donc pas trop la considérer comme une Summilux). Nous adorons, mais c’est (beaucoup) plus cher que la concurrence et plus encombrant.

Notre avis : meilleur rapport qualité/prix d’entre tous, le Ricoh GRII offre, de manière tout à fait subjective, la meilleure ergonomie possible pur un boîtier compact. Le Fuji est aussi bon, plus solide mais moins abouti en termes d’ergonomie. Le Leica Q est une merveille mais il faut accepter son encombrement supérieur. Et pouvoir se le payer !

Le choix en 35 mm

Fujifilm X100F

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Si c’est Sigma qui a sorti le premier un compact à focale fixe et capteur APS-C en 2009 (le DP1), c’est bien Fujifilm qui porté l’intérêt du format aux yeux du public en 2011 avec le premier X100, un appareil dont la quatrième itération ici présentée (F = four) reprend les atouts. A savoir la même optique équivalente à un 35 mm f/2 (23 mm APS-C) placée devant un capteur APS-C de 24 Mpix – le même que le X-T2 ! – et surtout le même look rétro porté par un viseur hybride optique et numérique. Ce quatrième modèle profite, outre de performances très en hausse, notamment en termes d’AF, d’une ergonomie repensée qui le rend redoutable et désormais utilisable dans le cas de reportages professionnels.

Petit bonus : le X100F profite de 3 compléments optiques (28/50/70 mm) qui permettent de le transformer en « hybride » d’appoint. Un bon argument pour ceux qui ont peur de la focale fixe.

Sony RX1R Mark II

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Son capteur plein format de 42 Mpix écrase la concurrence en termes de définition d’image pure… dans les conditions idéales. Miniaturisé au maximum, ce nain au capteur de géant souffre en effet d’une optique pas adaptée à ce capteur hors norme – il faut fermer le diaphragme à f/8 pour que ça pique vraiment ! La douceur de l’optique Zeiss a certes des avantages – l’isolation du sujet est sans pareille – mais l’absence de système de stabilisation favorise la production d’images légèrement floues. Capable de rentrer dans une poche de veste, cette arme à double tranchant est un appareil d’autant plus impressionnant que l’écran est enfin orientable et qu’il est enfin équipé d’un viseur électronique intégré. Mais il faut savoir le maîtriser – et le manipuler avec précautions car il est un peu fragile.

Le cas Sigma

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Sigma est un opticien japonais qui dispose d’une ligne de quatre boîtiers à capteur APS-C et focale fixe inamovibles, les DP Quattro. Chaque numéro d’un DP correspondant à sa focale :

DP0 : équivalent 21 mm
DP1 : équivalent 28 mm
DP2 : équivalent 45 mm
DP3 : équivalent 75 mm

Equipés de la dernière génération de capteur Foveon, ces quatre boîtiers ne rentrent pas dans notre sélection pour plusieurs raisons. Ils sont d’abord très encombrants avec leur forme de boîtier biscornu. Et puis ils sont technologiquement tellement différents qu’ils ne peuvent être comparés à la compétition. En effet, Sigma dispose de sa propre technologie de capteur. Appelé Foveon (la fovéa est la zone de la rétine la plus précise), ce capteur unique est basé, non pas sur une matrice de bayer avec des photosites monochromatiques comme 99,9% des capteurs CMOS classiques, mais sur un système de triple couche RVB faisant de chaque photosite un vrai pixel codant pour les 3 couleurs primaires.

Or s’il est très performant en hautes lumières puisque les pixels n’ont pas besoin de créer les informations colorées manquantes, le capteur souffre dans de nombreux domaines. La montée en ISO est très limitée (la dégradation apparaît dès 400 ISO), Sigma n’étant pas un électronicien à la base, l’AF est lent, sa précision limitée, la rafale itou, la vidéo est absente, etc. Visant un public de photographes esthètes à la recherche d’une excellente qualité d’image dans un format inférieur à un reflex et pour un prix bien plus accessible, ces boîtiers ont leurs fans, mais ne sont pas à mettre entre toutes les mains.

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