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Chine: la grande marche vers Linux

Le gouvernement de Pékin veut diffuser Linux en masse pour contrer les logiciels de Microsoft, jugés trop chers. Au centre de cette stratégie, Jian Mianheng, le propre fils du président et directeur de l’Académie des sciences.

Le gouvernement chinois part en guerre contre Microsoft. Son arme ? RedFlag Linux Desktop 2.0, dernière mouture d’un très officiel système d’exploitation Linux à la sauce extrême-orientale. ” Ce lancement cassera le monopole de Windows sur le marché chinois “, a d’ailleurs affirmé sans ambages Chen Chong, haut fonctionnaire du ministère de l’Industrie, au quotidien en ligne China Daily. Avant de poursuivre : ” Notre ministère va contribuer de son mieux au développement de RedFlag et des autres distributions Linux. “En clair, pour ceux qui n’auraient pas compris le message : tous les programmeurs des institutions publiques sont instamment invités à développer leurs applications pour Linux. Dans la sphère privée, TCL Computers, le 6e vendeur micro de Chine, a même décidé d’installer RedFlag Linux sur ses machines, en lieu et place de Windows.Face à tant de volonté politique, on peut donc se demander ce qu’a fait Microsoft pour s’attirer l’ire des fonctionnaires chinois ?
Si l’on en croit Bill Gates, grand architecte logiciel de l’éditeur, rien du tout. Ses affaires tournent même plutôt bien dans l’empire du Milieu. “Notre plus grosse croissance sur le segment des serveurs est en Chine. Ce que la presse écrit sur le soi-disant phénomène Linux là-bas et les faits sur le terrain sont 100 % différents.”, a-t-il récemment déclaré au quotidien en ligne Red Herring. Foi de Bill Gates.

La piraterie, casse-tête chinois de Microsoft

De fait, plus de 90 % des PC et environ 60 % des serveurs Web chinois fonctionnent sous Windows. Soit environ 5,4 millions d’ordinateurs personnels, selon les estimations du China Daily, organe de presse contrôlé par les autorités chinoises.Et pour embellir encore plus la situation, Graham 
Brant, directeur de la branche hongkongaise de Microsoft, a déclaré à Reuters le 31 mai dernier : ” Notre croissance devrait encore doubler cette année en Chine. “ Oui mais. Pour l’éditeur, le tableau n’est pas si rose que cela. ” Nous possédons une grosse part de marché, mais réalisons peu de chiffre d’affaires “, a-t-il convenu.Car le casse-tête chinois de Microsoft, c’est la piraterie. Un logiciel comme Microsoft Office est vendu 480 dollars en Chine, soit l’équivalent de cinq mois de salaire moyen. Une politique de prix fortement critiquée par les Chinois, et qui n’a pas tôt fait d’encourager les copies illégales.A cela se conjuguent les maladresses de l’éditeur américain. En effet, Microsoft a fait appel à des équipes taïwanaises pour traduire son logiciel Windows 95 ! Et ces derniers auraient glissé à l’intérieur du logiciel des messages du type “bandits communistes”, fort peu appréciés des autorités chinoises…
Enfin, les rumeurs persistantes concernant l’attribution à la National Security Agency ( NSA) américaine de clefs d’entrée dans Windows N 4 service pack 5 à des fins d’espionnage n’ont rien fait pour redorer le blason de l’éditeur.

Le fils du président chinois aux manettes de RedFlag

Plus prosaïquement, le grand satan de Microsoft en Chine pourrait s’appeler Jiang Mianheng, fils aîné du président chinois Jiang Zemin. Lequel illustre personnage dirige l’académie des sciences chinoise qui a développé, en partenariat avec Compaq, la distribution Linux du peuple. Mais sans omettre de penser à ses intérêts en passant, semble-t-il.Car l’académie des sciences chinoise possède 60 % des parts de la société RedFlag. Les 40% restants sont détenus par le fond de capital risque Shangaï New Margin Venture Capital cofondé par… Jiang Mianheng ” himself “. Si l’on ajoute que RedFlag a annoncé son ambition d’entrer prochainement en Bourse à Hong Kong, et que son potentiel de développement peut se mesurer à l’aune de la population (ou presque) du pays, on comprend peut-être un peu mieux les motivations anti-Microsoft de Pékin. Une histoire de gros sous au pays du communisme en quelque sorte…

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Antonin Billet