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Catalogues électroniques : le premier bilan

L’échange électronique de fiches produit alimentaires se généralise entre distributeurs et fournisseurs. Reste à améliorer la qualité des données et à élargir les usages de ces catalogues.

Au cours des dix dernières années, le nombre de références gérées par la grande distribution française a plus que doublé. Il atteint près de 100 000 dans certains magasins et jusqu’à 500 000 dans les centrales ! De quoi multiplier les risques de litige et faire enfler les frais de gestion. Devant la prolifération de nouveaux produits et d’opérations promotionnelles, les grandes enseignes et l’organisme de standardisation GS1 France avaient décidé de consacrer l’année 2008 au déploiement des catalogues électroniques, ces outils facilitant l’échange d’informations sur les produits. L’idée étant d’agir à la fois sur la diminution des coûts administratifs, la réduction des délais de commercialisation, la baisse du nombre de litiges et de leur temps de traitement, ou encore sur l’optimisation des opérations logistiques, avec le taux de remplissage des camions et le temps de réception en entrepôt.Le bilan de l’opération s’avère positif et le premier semestre 2009 a permis d’enregistrer quelques progrès supplémentaires. En avril dernier, quatre enseignes de la grande distribution française ? Auchan, Carrefour, Leclerc et Cora-Provera ? dématérialisaient leurs fiches produit et les échangeaient avec plus de 2 500 fournisseurs. Pour mémoire, ces fiches sont des documents électroniques standardisés que les industriels renseignent avec des informations commerciales, marketing, logistiques ou qualité, et qu’ils mettent régulièrement à jour.

Une carte d’identité complète par produit

Ces informations comprennent notamment le code produit (GTIN), l’identification des acteurs (lieu de commande et de livraison), la classification (GPC), les descriptions (libellés, marque commerciale…), les mesures, les durées de vie et les délais, les caractéristiques techniques, les liens logistiques ou de remplacement … Les informations sur les dimensions servent, par exemple, à dresser des plans de linéaires, tandis que les données techniques sur la composition peuvent renseigner les consommateurs sur les allergènes. Sur les 200 attributs définis par GS1, la distribution française en a retenu environ 120, alors que le secteur équivalent aux Etats-Unis n’en utilise qu’une quarantaine !Pionnière dans l’adoption de la fiche produit ? dès 2005, et donc avant la publication des standards ?, la centrale Provera (groupe Cora) en a mis en place une version en partie standard pour 92 % de son activité promotionnelle dans le domaine alimentaire : 590 industriels sont abonnés à un de ses catalogues et 130 utilisent la saisie manuelle sur un portail. “ Actuellement, nous développons les fiches produit pour les références permanentes ”, précise Ménouar Lounes, administrateur du référentiel.Chez Carrefour, la mise en production des catalogues électroniques n’a commencé qu’à la fin 2007. Mais le distributeur a adopté le standard GS1 et s’est directement attaqué à tous les types de produits (permanents, saisonniers ou promotionnels) et de données (neutres, logistiques et, dernièrement, tarifaires) dans le domaine alimentaire. “ Aujourd’hui, 87 % de nos fournisseurs de PGC (produits de grande consommation) peuvent échanger des fiches produit via le GDSN, en point à point ou via le portail, annonce Thierry Villate, responsable du référentiel. L’objectif est d’atteindre les 95 % d’ici à la fin de l’année. ” Le plus grand distributeur européen est le premier au monde à avoir testé et mis en production l’échange de données tarifaires au standard GS1. Mais il attend encore que les premiers fournisseurs soient prêts à échanger ce type de données.

Automatiser les échanges

Un autre défi consiste à convaincre les industriels d’automatiser leurs échanges de données produit. Selon GS1 France, 39 % des 2 030 fournisseurs dématérialisés dans le domaine alimentaire saisissent encore manuellement leurs fiches produit sur des portails. Dans le domaine non alimentaire, cette proportion monte à 85 % (sur 500 fournisseurs ayant adopté la fiche produit). Pire, l’essentiel des échanges est encore réalisé en mode point à point : la connexion directe au GDSN ne concerne que respectivement 8 % et 1 % des fournisseurs. A titre d’exemple, seuls 3 % des fournisseurs dématérialisés de Carrefour ont directement accès au GDSN, ce qui représente tout de même 15 % des références du distributeur. Les fournisseurs saisissant leurs fiches produit sur le portail de Carrefour n’ont en moyenne que 10 à 15 références, le distributeur fixant la limite à 20. De plus, Thierry Villate prévient : “ Le portail n’est plus ouvert aux fournisseurs de vin, ni aux nouveaux. ”

Des bénéfices à partager

Il est vrai qu’en règle générale les fournisseurs présentant moins d’une cinquantaine de références, avec une durée de vie importante et peu d’opérations de promotions, recourent le plus souvent aux interfaces de saisie des catalogues en ligne. Les autres font plus naturellement appel à un outil de gestion de l’information produit (PIM, Product Information Management), leur permettant de rassembler les informations extraites des différentes bases de données de l’entreprise, de les compléter, de créer des fiches produit, puis de les envoyer pour publication.Il leur faut ensuite s’assurer de la qualité des données produit échangées. Outre les méthodes et formations proposées par GS1 France, des outils de nettoyage et de normalisation des données (tels que ceux proposés par Informatica et Dataflux) sont souvent employés par les entreprises gérant de grands volumes de données.Heureusement, ce travail ne bénéficie pas qu’aux distributeurs. Comme le montre l’exemple de Ricard France. Jusqu’à son projet de gestion de données synchronisée, celui-ci souffrait de multiples ressaisies, de supports différents et évolutifs, et de délais de mise à disposition de l’information. De fait, le non-alignement de ses données (l’équivalent d’un millier de fiches produit) entraînait de nombreux retraitements de commandes EDI (EAN de commande erroné, écart de poids, etc.), des risques de litige (refus de livraison…) et des risques commerciaux (rupture d’approvisionnement, prospectus erronés…). La mise en œuvre du projet a non seulement répondu à l’ensemble de ses problèmes, mais fournit aussi un catalogue électronique à usage interne avec des possibilités d’extractions au format Excel. “ Comme notre PGI JD Edwards contenait déjà 80 % des données nécessaires au catalogue électronique grâce à différents interfaçages internes, nous avons préféré le conserver comme référentiel maître, plutôt que d’adopter un PIM ”, précise Frédéric Robin, responsable de l’architecture technique. Grâce à Connect-GDS de Connectiv IT, le PGI est interfacé à 1Sync, le premier datapool mondial, auquel se connectent la plupart des distributeurs. Les données tarifaires et promotions sont, elles, complétées dans les portails des distributeurs.“ Alors que certaines PME considèrent encore les catalogues électroniques comme un coût de référencement, d’autres en ont bien compris les bénéfices et en font un véritable projet d’entreprise ”, confirme Stéphane Romat, responsable de l’offre Catalogic chez Trace One. Il estime cependant que le marché national est saturé et que les données tarifaires et promotions, comme les produits non alimentaires, ne constituent pas encore un relais de croissance suffisant. Il se tourne désormais vers nos voisins européens, fort de l’avance que les entreprises françaises ont prise dans la mise en œuvre des catalogues électroniques. “ Après la commande et la facture, la fiche produit constitue le dernier message à être dématérialisé, ” observe Thierry Villate de Carrefour, avant d’ajouter : “ On aurait peut-être pu commencer pas là… ”

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Boris Mathieux