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Bertrand Kientz (JC Decaux) : ” Notre défi ? Conserver la réactivité d’une PME “

La DSI France de JC Decaux, désormais groupe, dirige aujourd’hui de grands projets mondiaux. Ceux-ci devraient rapidement permettre aux 115 filiales de partager une culture commune.

Le marché conclu par Jean-Claude Decaux il y a trente-huit ans avec des mairies de l’Hexagone ?” J’équipe gratuitement la ville d’abribus, de kiosques, de réverbères… dont j’assure la conception, l’assemblage, l’installation et la maintenance ; en échange, vous m’accordez une concession de dix à quinze ans par laquelle vous m’autorisez à commercialiser des emplacements publicitaires sur ce mobilier ?” est à l’origine du développement du groupe familial français, numéro un mondial pour le mobilier urbain. Ses activités se sont ensuite étendues à l’affichage grand format et à la publicité dans les transports.Le rachat de son concurrent Avenir, en 1999, lui a permis de doubler son chiffre d’affaires et d’accélérer son développement international. Celui-ci devant se poursuivre en Europe, Amérique et Asie-Pacifique, la direction informatique française a été chargée d’organiser la fonction DSI Groupe et de l’optimiser sur l’ensemble des entités (115 filiales dans 39 pays, où l’entreprise gère 580 000 emplacements de publicité).Aujourd’hui, afin de réduire les coûts et d’avoir une visibilité plus précise de l’ensemble des activités à travers le monde, dans un contexte attentiste sur le marché publicitaire, la DSI groupe attaque de front plusieurs grands chantiers, à commencer par celui du back office : SAP et la gestion de la chaîne logistique globale pour le mobilier urbain. D’autres projets, comme la mise en place d’un intranet et d’un entrepôt de données mondiaux, ou le B to B, sont des travaux de plus longue haleine.

Optimiser la chaîne logistique pour le mobilier

Pour gérer l’ensemble du back office (fortement concentré sur trois grands groupes internationaux, dont deux américains), la DSI a choisi un PGI. Notamment, SAP pour les plus grosses structures. Il s’agit d’une refonte complète des outils associés à la chaîne de fabrication des mobiliers urbains. En sachant que les composantes sont généralement fabriquées à l’extérieur, l’assemblage est centralisé en France à la direction industrielle, qui approvisionne et réapprovisionne pour l’entretien les 50 agences en France et les 30 filiales à l’étranger.Pourquoi avoir choisi une refonte complète plutôt que de faire évoluer l’existant ?Mis en place il y a huit ans, l’ancien système, qui fonctionnait sur AS400, n’était conçu ni pour la nouvelle dimension du groupe, ni pour la complexité du sujet (plusieurs milliers de nomenclatures).Quel est le calendrier du projet ?Il a été lancé en décembre 2001. SAP a été retenu au printemps 2002. Entre avril 2002 et février 2003, il s’agit de déployer le lot 1: achats/données techniques, fabrication et assemblage, chaîne d’approvisionnement, accès au système par les sous-traitants, les agences en France et quelques filiales. Trois cents utilisateurs sont concernés.Quels sont les gains attendus?On peut citer l’amélioration des délais et de la visibilité des livraisons, une réduction de 10% des stocks de pièces détachées destinées à l’entretien, ainsi que celle du nombre de gammes. Sans oublier une productivité accrue à la fois en interne et chez les sous-traitants.Quelles difficultés avez-vous rencontrées?Coller au plus près d’un progiciel standard comme SAP R/3 oblige a remettre en cause nos processus. Autre enseignement d’un tel projet : il faut structurer davantage les pratiques et les frontières entre les métiers. Cela explique que les responsables opérationnels aient été fortement impliqués dans l’équipe de pilotage du projet.Quels sont les impacts organisationnels ?Côté DSI : le centre de compétences PGI interne a acquis une compétence SAP, tandis que l’on assiste à une montée en charge d’un centre de compétences Unix autour des applications groupe. Côté utilisateurs, le PGI a un effet très structurant sur les liens entre les corps de métiers : fournisseurs, sous-traitants, exploitation, bureau d’études, unités d’assemblage et de stockage.

Bâtir un entrepôt de données mondial

Parmi les priorités de 2002, il a été décidé de bâtir un entrepôt de données mondial avec quelques indicateurs phares pour la direction générale. Hétérogènes, les systèmes décisionnels existants ne permettaient pas les consolidations (par exemple, définition différente du chiffre d’affaires entre pays). D’autre part, il fallait permettre un reporting de plus en plus fin au niveau groupe; la première étape étant la refonte des outils décisionnels commerciaux des deux plus grandes filiales ?” France et Grande-Bretagne ?” pour permettre d’avoir une vision consolidée après la fusion du mobilier urbain et de l’affichage grand format dans ces deux pays.Quel défi devez-vous relever sur ce projet complexe ?Il faut que l’entreprise conserve la réactivité d’une PME tout en étant un groupe international. La DSI groupe doit contribuer à fonder une culture groupe. Celle-ci existe déjà chez les dirigeants (chez eux, on relève une évolution vers des indicateurs standardisés, partagés, et, pour certains, publiés à l’extérieur). Elle est moins perceptible dans les filiales. Nous avons six mois pour livrer un outil unique pour la direction générale. De multiples difficultés surgissent autour de ce projet. Par exemple, le top management ne parle pas le même langage que les commerciaux. Et, pour expérimenter le lot “Directoire”, il n’est pas simple de trouver un directeur général qui prenne le temps de s’impliquer.Quels changements organisationnels sous-tend-il ?Dans les services commerciaux, se met en place une organisation centralisée d’optimisation du revenu publicitaire, ou “yield management”, utilisant des outils d’analyse et de prévision de la demande. Pour sa part, la DSI a créé un centre de compétences décisionnel pour piloter la mise en place d’une architecture de développement et d’exploitation standardisée et coordonner les projets de déploiement à l’international. Le projet représente pour la DSI une charge évaluée à 105 mois/homme sur deux ans.Bénéficiez-vous d’une assistance externe pour les développements ?Ce vaste projet repose sur un compromis entre progiciel et développements spécifiques. Nos équipes de développement bénéficient d’un transfert de technologie de la part d’un consultant externe. Les utilisateurs Business Objects passeront de 50 en novembre 2002 à 1000 à la mi-2004 après déploiement des lots “Directoire”, commerciaux, marketing et industriel dans 5 pays. En 2003, nous avons prévu d’étendre le Datawarehouse au domaine de la gestion des contrats avec les villes (en lien avec les nouvelles normes IAS).

Développer le B TO B

La mise en place d’extranets avec les partenaires (fournisseurs, mairies pour le mobilier urbain, et les annonceurs ou les agences de création), est encore au stade expérimental. Cependant, un certain nombre de projets pilotes ont été lancés dans différents pays, et des opportunités se dessinent pour 2003.En quoi consistent les liens intranets avec les mairies ?Il s’agit, via un système cartographique, de donner aux municipalités une visibilité directe à leur mobilier urbain, à l’état de celui-ci (en cours de montage, en réparation…), et leur permettre de dialoguer avec les services opérationnels de notre groupe. Ce type de système a été créé en France. Il est maintenant proposé pour la plupart des renouvellements d’appels d’offres. Par exemple, il va être déployé à Chicago, marché que nous avons remporté cet été.Et avec les agences de publicité ?En Scandinavie, le groupe propose à certaines agences de création un accès aux photographies des panneaux, avec possibilité d’incrustation des visuels publicitaires en cours de conception. Cet outil va être packagé et mis à disposition des autres filiales. La pratique d’accès direct des agences de publicités sur les disponibilités d’espaces est plus ou moins développée selon les pays. Au préalable, il faudra normaliser les échanges (“edifact media” ). Cette étape est prévue pour 2003 et nous capitaliserons sur le savoir-faire acquis dans certains pays.Avez-vous d’autres partenariats à l’étude ?Oui, des liens directs avec certains gros annonceurs et avec les fabricants d’affiches. Les “account managers” de la DSI groupe développent une activité de veille sur les initiatives de ce type dans les pays ou le B to B se développe. La Direction applications front office a pris en charge les systèmes d’accès des villes, celui des outils de vente et va déployer les outils de liens avec les agences.

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Christine Peressini