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Bernard Lorig (France Télécom) : ‘ Nous négocions actuellement la vente de trois de nos entreprises essaimées ‘

Lors des rencontres du capital-risque de Sophia-Antipolis, les grands groupes ont fait le point sur l’essaimage. L’occasion pour Bernard Lorig, responsable de la mission essaimage de France Télécom, de faire le point sur cette activité.

En marge de la septième édition de l’IVCS (International Venture Capital Summit), la rencontre entrepreneurs-investisseurs qui se déroule à Sophia-Antipolis, se tient une conférence sur l’essaimage. Bernard Lorig, responsable de la
mission essaimage de France Télécom, fait le point sur une activité qui a permis depuis 1998 à une kyrielle de sociétés de voir le jour. Algety, Highdeal, Highwave Optical, Netcentrex, Telisma ou encore Wokup ! en sont quelques
exemples.01net. : Votre activité essaimage n’est-elle pas en contradiction affichée avec l’ambition de votre PDG, Thierry Breton, de mieux valoriser les brevets du groupe ?Bernard Lorig : Non, nous pensons qu’il est parfois plus intéressant financièrement d’investir dans une jeune pousse. Par exemple, lorsque Algety Telecom a fusionné avec Corvis,
cela a rapporté plus d’argent au groupe que si nous avions revendu à un équipementier une technologie développée en interne. Mais, il est vrai, les modalités de sortie financière étaient à l’époque plus intéressantes et faciles
qu’aujourd’hui. À ce titre, nous connaissons les mêmes difficultés que les capital-risqueurs : la Bourse ne présente pas de perspectives intéressantes pour le moment, on s’oriente donc plutôt vers des
fusions?”acquisitions pour nos entreprises essaimées, avec des valorisations normales depuis la fin de la bulle Internet.Vous avez des sorties de capital en vue ?Oui, nous avons des discussions en cours avec des industriels pour trois de nos entreprises TIC essaimées, mais je ne peux vous en dire plus pour le moment…France Télécom mène-t-il une politique spécifique en la matière, comparé à d’autres entreprises technologiques ?Si l’on se compare à d’autres anciens opérateurs “historiques” comme BT ou Lucent, ceux-ci ont externalisé les fonctions d’incubation. [France Télécom avait toutefois créé une stucture
spécifique, InventMobile. Depuis le repositionnement de l’opérateur vers son activité historique, l’incubateur à été intégré à Innovavom, NDLR.]
Nous possédons également notre propre fonds de capital-risque,
Innovacom
[France Télécom est minoritaire dans le dernier fonds sursouscrit à 120 millions d’euros, NDLR.]Comment se passe concrètement un projet d’essaimage ?Il y a forcément une période de transition pour les chercheurs désireux de créer leur entreprise et de valoriser leurs produits. En général, ils disposent, au début, d’un tiers de leur temps pour mener à bien leur projet. En
fin de parcours, ils y travaillent à temps complet. Il y a deux ans, cela leur prenait en moyenne six mois pour trouver d’autres investisseurs. Aujourd’hui, plutôt neuf, car les capital-risqueurs sont devenus plus méfiants,
ils prennent plus de temps pour étudier les dossiers. Une fois quitté le groupe France Télécom, les personnels de statut privé disposent de trois années pour le réintégrer à un poste équivalent, en vertu du congé pour création d’entreprise.
Quant aux personnels fonctionnaires, ils ont jusqu’à douze ans pour revenir.Comment procédez-vous avec les jeunes pousses dans les TIC ?Nous investissons dans l’entreprise une partie de la propriété intellectuelle ?” brevets, logiciels, marques ?” développée par nos collaborateurs. En fait, France Télécom Technologies et Investissements
(FFTI), filiale à 100 % du groupe, investit directement dans le capital de la jeune pousse. Celle-ci reverse cette somme à France Télécom SA, afin d’acquérir les droits de propriété intellectuelle. C’est un jeu d’écriture.
Par ailleurs, nous avons un accord avec Innovacom, par lequel nous leur soumettons systématiquement et en premier lieu les dossiers d’essaimage technologique jugés pertinents. Nous collaborons également avec FFTI, mais aussi des fonds comme
Galileo Partners, Guillemot Ventures, 3I, Newberry Ventures ou la CDC. Notre investissement est toujours minoritaire dans le capital de ces entreprises, dès le premier tour (à la différence des États-Unis, car un entrepreneur en France a du mal à ne
pas être investisseur majoritaire de son entreprise)…Quand et dans quel but a été créée la mission essaimage de France Télécom ?Elle existe depuis mars 1998. Cette date correspond à la transformation du CNET en France Télécom R&D, avec des études techniques qu’il nous fallait arrêter. L’objectif était donc de mieux valoriser nos technologies, en
aidant les chercheurs qui voulaient se lancer dans la création d’entreprise. Car des PME “amies” nous semblaient capables d’entrer plus rapidement dans des marchés innovants qu’un grand groupe comme France Télécom.
En 1999, nous avons regroupé cette mission avec celle dédiée à la mobilité. Aujourd’hui, six personnes travaillent dans mon équipe, au sein de France Télécom, dont la branche Technologies et Innovation (qui regroupe France Télécom R&D, la
direction de l’innovation, la direction de la valorisation et de la propriété intellectuelle et le fonds de capital-risque Innovacom).Quels résultats avez-vous enregistrés depuis ?De manière générale, nous avons soutenu la création de 350 entreprises de toutes sortes (du bar tabac en Corrèze à un restaurant au Laos, ou à une pêcherie au Cap-Vert…). Trois cents sont toujours en activité. Cela a
représenté quatre cent cinquante départs volontaires du groupe et deux mille créations d’emplois. Sur le plan des entreprises purement technologiques, nous avons investi l’équivalent de 18 millions d’euros en propriété
intellectuelle dans trente-cinq jeunes pousses. Seulement deux d’entre elles vont mal aujourd’hui. Je pense que nous ne nous sommes donc pas trop trompés, que nous n’avons pas fait tout et n’importe quoi, même au moment de la
bulle Internet. Ainsi, nous ne donnons pas suite, en moyenne, à 50 % des projets présentés, car ils nous semblent inaboutis ou irréalistes.

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Propos recueillis par Laurent Campagnolle