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Bernard Albigès : un pilote expérimenté pour l’hôpital

L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris mutualise son système d’information pour qu’il se focalise sur les soins au patient.

Jusqu’en 1998, Bernard Albigès a mené sa carrière exclusivement dans le secteur privé. Essentiellement dans l’industrie, qui plus est. Son dernier poste était alors celui de directeur du programme de réingénierie de Renault Véhicules Industriels. Pourtant, cette année-là, il accepte de prendre la direction des systèmes d’information de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP)… et il bascule dans un autre monde. Dès lors, il le sait, budgets réduits et fonctionnement loin de toute recherche de rentabilité économique deviendront son lot quotidien. Ce qui lui reste à découvrir, c’est le gouffre entre les systèmes d’information (SI) des hôpitaux et ceux de l’industrie. A la quarantaine d’établissements de l’institution correspondent quasiment autant de SI. Les notions de conduite de projet, d’équipes pluridisciplinaires, de maîtrise d’?”uvre et d’ouvrage, naturelles dans l’industrie, sont ici totalement absentes. Paradoxalement, c’est ce défi qui a conduit Bernard Albigès à accepter le poste. Mais aussi le fait de se retrouver au c?”ur d’une entreprise dont le métier est de soigner. “Ici, la priorité, ce n’est pas d’obtenir un retour sur investissement, mais d’apporter des soins, voire de sauver des vies, précise-t-il. Un métier passionnant, où il est impossible de rester neutre. C’est essentiel pour moi. Et cela devient même de plus en plus motivant.”

La pratique de la transversalité avance à l’hôpital

Dès son arrivée, Bernard Albigès ?”uvre pour “placer le patient au c?”ur d’un système d’information qui restait majoritairement administratif”. La mutualisation devient le maître mot. “En 1999, l’hôpital Cochin a souhaité refondre l’informatique de ses urgences. J’ai, bien entendu, accepté. Mais j’ai demandé que soit constitué un groupe de travail avec d’autres services d’urgence. Ce qui a été fait. Et, même si certaines problématiques différaient, le cahier des charges et l’appel d’offres ont été définis en commun. Le projet a débuté à la fin de l’année 1999 à Cochin ; deux ans plus tard, nous avions équipé une douzaine de sites. A l’occasion de l’ouverture de l’hôpital de gérontologie Bretonneau, nous sommes allés jusqu’à décider d’un projet global de système d’information hospitalier de gérontologie.” Autant d’exemples qui sont aussi devenus des outils de communication en convainquant, peu à peu, l’ensemble de l’AP-HP de travailler selon ce modèle. “Pour la prescription d’activités de soins dans les hôpitaux “d’aigu”, les quatre établissements concernés (Henri Mondor, Bichat, Saint-Louis et Cochin) sont directement venus me voir ensemble.”Mais le DSI de l’AP-HP ne s’est pas contenté de procéder par l’exemple. Il a immédiatement mis en place une organisation de pilotage du système d’information. Celle-ci s’appuie sur trois niveaux de décision, au filtre desquels passent tous les projets. Le premier, gardien des grandes orientations, est un comité stratégique constitué, notamment, de membres du comité de direction et de responsables médicaux, dont la dernière réunion s’est tenue en septembre 2002. Les responsables de direction d’activités se réunissent, eux, tous les deux mois au sein du deuxième niveau, les Cosido (Comités d’orientation des systèmes d’information par domaine). Au nombre de trois, ils traitent du patient, des ressources humaines et de la gestion hospitalière. Enfin, chaque projet bénéficie désormais d’un comité de pilotage propre. “Plus aucun programme n’est validé sans caution préalable des Cosido. Et, paradoxalement, maintenant que nous disposons du bon système pour filtrer les bonnes demandes, lorsque nous les totalisons, les besoins budgétaires explosent largement au-delà du montant actuellement possible ! A l’occasion du deuxième comité stratégique, nous avons dû procéder à un choix draconien.” Cette rigueur, Bernard Albigès l’a sans nul doute puisée dans son passé industriel. Il le reconnaît sans problème. Pourtant, il conteste que ce type de parcours soit indispensable pour aboutir aux mêmes conclusions. “Bien sûr, en venant me chercher, l’AP-HP souhaitait quelqu’un qui connaisse l’état de l’art, qui soit doté d’une démarche projet, raisonnant processus, travaillant de façon transversale… Je suis certainement porteur d’innovation dans le domaine de la santé, et l’organisation que j’ai mise en place résulte, entre autres, de mon parcours dans le privé. Mais bon nombre de responsables informatiques ?” que ce soit au sein de l’AP-HP ou ailleurs dans le secteur de la santé ?” partagent une vision des choses similaire. Ils procèdent de la même façon, même s’ils ont suivi des parcours parfois totalement différents.” Car, au final, tous se sont donné le même objectif : combler le fossé qui sépare les systèmes d’information des hôpitaux de ceux de l’industrie.

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Emmanuelle Delsol