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Bercy contraint les assureurs à financer les PME

Sous la pression du ministère des Finances, les assureurs se sont engagés à investir 6 milliards d’euros supplémentaires dans les PME. Mais rien ne garantit que cet argent ira aux entreprises innovantes.

C’est fait. Comme nous
l’indiquait il y a quelques mois à peine le ministre délégué à la Recherche, François d’Aubert, une partie des fonds des assurances est appelée à financer les entreprises innovantes.L’accord signé mardi dernier entre le ministre des Finances et les représentants de la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) et du Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (Gema) engage les assureurs à accroître
de 6 milliards d’euros leurs investissements dans les PME, non cotées ou cotées sur les marchés non réglementés, d’ici à la fin de l’année 2007. La mesure ne prévoit cependant aucun minimum d’investissement dans les entreprises technologiques.‘ L’innovation ne s’arrête pas aux entreprises high-tech. On peut innover dans le domaine industriel ou dans celui du textile, nuance Christian Poyau, PDG de la SSII Micropole-Univers et président
sortant de Croissance Plus. Nous n’avons pas sollicité de ratios car notre association promeut l’ensemble des entreprises en croissance. Si nous avions imposé des ratios pour la high-tech, il aurait fallu fixer des minima pour d’autres
secteurs d’activité. ‘
Certains laissent également entendre que la transformation en simple accord de ce qui devait être à l’origine un projet de loi a obligé les représentants des valeurs moyennes (Croissance Plus, Middle Next, le conseil stratégique de
l’Innovation) à assouplir leur position.Néanmoins, par effet boule de neige, l’argent devrait bien finir par atterrir dans l’escarcelle de quelques entreprises innovantes. ‘ Nous avons obtenu cet accord en montrant aux assureurs que les TRI
(Taux de retour sur investissement) dans le non-coté ne sont pas inférieurs à ceux des entreprises cotées. Sans nul doute, une partie de cette manne ira financer l’innovation. Les fonds des assureurs dont la durée de vie est
plus longue que les FCPI
[Fonds commun de placement pour l’innovation] donneront aux investisseurs le temps de réaliser des retours sur investissement dans les entreprises innovantes ‘, commente
Jean-René Boidron, PDG de CosmosBay et membre du comité directeur de Croissance Plus.

Les investisseurs privilégient les entreprises matures

Cependant, le risque est important de voir une fois de plus l’intérêt des investisseurs se porter vers des sociétés plus matures et donc moins risquées. Nicolas Korboulowski, directeur technique de Cybertroniques, une entreprise
ayant développé un outil d’administration web, émet quelques réserves sur les retombées de l’accord pour sa société : ‘ Même si la mesure va dans le bon sens, nous avons quelque crainte par rapport à notre activité.
Depuis le retournement de la bulle, les sociétés liées de près ou de loin à l’Internet sont bannies par les investisseurs. ‘
Financée sur fonds propres depuis sa création en 1999, Cybertroniques est en quête de capitaux pour développer son réseau commercial.Les investisseurs sont tout aussi sceptiques quant aux retombées de cet accord sur le financement de l’innovation. ‘ Cet accord n’aura pas un fort impact sur notre métier de société de capital-investissement.
D’une manière générale, les investisseurs ont tendance à privilégier les allocations sur les actifs alternatifs
[non-coté, NDLR] afin de réduire la volatilité de leur portefeuille. L’accord signé entre les assureurs et Bercy
s’inscrit donc dans une tendance générale ‘
, explique Dominique Senequier, président du directoire d’Axa Private Equity, la filiale de l’assureur AXA dédiée au capital investissement.Entendez par là que les investisseurs n’ont pas attendu la mesure du gouvernement pour investir dans les entreprises non cotées. Ainsi sur les 5,5 milliards d’euros que gère Axa Private Equity, 250 millions sont consacrés à
l’activité capital-risque. Autrement dit aux entreprises innovantes.L’accord ne favorisera pas non plus les levées de fonds (Fundraising). Les sociétés d’investissements vont chercher la majorité de leurs ressources auprès des fonds de fonds ou fonds de pensions étrangers.Pour les investisseurs il n’y aurait donc pas pénurie d’argent, mais bien pénurie dentreprises innovantes.

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Hélène Puel