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Au secours l’Etat !

Maudit par les gourous des nouvelles technologies il y a deux ans, l’Etat est aujourd’hui appelé en renfort. Pour presque tout et n’importe quoi.

Cela commence comme un épisode de Capitaine Flam : “Au fin fond de l’univers, à des années lumière de la Terre, veille celui que les nouvelles technologies appellent, quand elles ne sont plus capables de trouver une solution à leurs problèmes ou quand il ne reste plus aucun espoir…” De qui s’agit-il ? Non, pas du Capitaine Flam, mais de l’Etat. C’est assez symptomatique, depuis quelques semaines, tout le monde parle de notre héros des temps modernes.

Pourquoi un modèle qui échoue dans le privé réussirait-il dans le public ?

La semaine dernière, Le Nouvel Hebdo publiait un ” confidentiel ” selon lequel la Mairie de Paris pourrait reprendre l’incubateur de start-up Republic Alley. Lors de la présentation du livre blanc de l’EBG (Electronic Business Group) sur le haut débit, les débatteurs juraient leurs grands dieux que sans l’intervention de notre capitaine l’Etat, il n’y aurait jamais eu d’Internet en France. L’association des fournisseurs d’accès à Internet demandait il y a trois semaines à l’Etat d’accorder une prime de rentrée aux personnes s’équipant d’un ordinateur. Quant aux candidats à la présidence de la République, après un silence de mort jusqu’en février, les voilà promettant tous une flopée de mesures, destinées à développer les nouvelles technologies.Mais, cela ne vous a pas échappé, tous ces supers projets vont être financés avec de l’argent public. Et, du coup, il est tout de même de bon ton de se demander s’il est bien opportun de dépenser dans tout et n’importe quoi portant un label ” nouvelles technos “. Par exemple, je me demande ?” à titre de citoyen ?” en quoi la Mairie de Paris est légitime pour reprendre Republic Alley. Le concept n’a pas fonctionné, lorsque la structure était privée ?” donc assez souple ?”, pourquoi marcherait-elle davantage, menée par des représentants de la Mairie, qui n’y placeront que l’argent du contribuable.Oui, je crois que c’est bien la mission de la Mairie de Paris de contribuer à faire naître des sociétés. Mais pour cela, il existe des pépinières d’entreprises ; pourquoi aller chercher un incubateur dans le Sentier ?

Qui va payer le haut débit ?

De même, grande interrogation : est-ce aux contribuables de financer la construction de boucles locales à haut débit dans des régions mal desservies ? Pour mémoire, il existe une taxe en France (comme partout en Europe, ou presque) appelée ” service universel “. Sur chaque minute de communication (Internet, fixe, mobile), quelques dixièmes de centimes sont prélevés et reversés à France Télécom pour maintenir ce fameux service universel : apporter le téléphone à tout le monde partout et au même prix final. Soit le haut débit est un enjeu de société dont l’avenir de la France dépend, et dans ce cas là, il faut en faire un service universel et en confier la gestion à France Télécom (ou à un autre). Soit il n’en est pas un, auquel cas, les collectivités locales n’ont aucune raison d’investir dans de la fibre optique.Comprenons nous bien, je ne suis contre rien, a priori. Mais je trouve bizarre que des personnes, nous expliquant d’un côté que l’Etat n’est pas capable de gérer nos retraites, puissent soutenir de l’autre que le chef de district de Plouvieux-la-garenne va devenir spécialiste de la fibre optique. “Il ne faut pas tout attendre de l’Etat”, disait Lionel Jospin sur un autre sujet, pourquoi ne pas l’appliquer aux nouvelles technologies ? L’Etat peut et doit encourager les investissements des acteurs privés, beaucoup plus qu’il ne le fait aujourd’hui. Mais il na aucune légitimité à refaire ce que des entreprises privées ont essayé de faire avant lui sans succès.*Grand reporter au Nouvel Hebdo

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Alain Steinmann*