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Après s’en être réjoui, Arnaud Montebourg déplore l’arrivée de Free Mobile

Dans un entretien à L’Usine nouvelle, le ministre du Redressement productif estime que Huaweï et ZTE ont été favorisés par rapport à Alcatel et que Free Mobile a causé un désastre social.

Pour Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, le gouvernement de François Fillon a laissé derrière lui « un champ de ruine », notamment en matière de technologie de l’information et de téléphonie.

Dans un entretien accordé à L’Usine Nouvelle, sans pull rayé, pour présenter le crédit d’impôt compétitivité, le ministre a pris deux exemples pour étayer ses arguments sur la perte de vitesse de l’industrie française. L’un concerne les systèmes de télécommunication en Europe, l’autre touche plus particulièrement l’arrivée en France de Free Mobile comme quatrième opérateur.

Sans hésiter, il attaque : « Tout a été laissé à l’abandon. » Il justifie cette estocade en précisant que les opérateurs en place ont mis « Alcatel dans une situation de grande difficulté pour mettre en selle Huaweï et ZTE dans les systèmes de télécommunications européens. »

« Nos prédécesseurs ont laissé un capharnaüm. »

Sans affirmer que Free est directement responsable des difficultés d’Alcatel, il n’hésite pas à affirmer qu’elle n’est pas pour rien dans la situation délicate de SFR, Bouygues et Orange. Et l’arme du crime porte un nom pas vraiment « Made in France » : c’est le low cost. « La course au low cost avec l’arrivée de Free Mobile a eu des conséquences sur les opérateurs, sur la sous-traitance, sur les fournisseurs. Et la situation d’Alcatel s’est aggravée : -40 % en un an en France. On ne peut le nier. Dans la téléphonie, nos prédécesseurs nous ont laissé un capharnaüm. »

Mais le quatrième opérateur a surtout apporté « des destructions d’emplois dans la sous-traitance, la précarisation des travailleurs chez Free, les délocalisations accélérées dans les centres d’appels, l’aggravation des difficultés d’Alcatel. » Il dédouane toutefois Xavier Niel qui ne doit pas porter la responsabilité « des choix de François Fillon ».

Les Français sont-ils prêts à payer plus cher ?

Ardent défenseur de Free, de sa stratégie et de ses services, le site UniversFreebox est venu à la rescousse de l’entreprise : « On croirait entendre mot pour mot les propos de Martin Bouygues. »

Le site communautaire estime surtout que l’accusation est « étonnante puisque […] Free Mobile est le seul opérateur à ne pas avoir choisi d’équipementier chinois et à s’équiper chez l’Européen Nokia Siemens Networks […]. Free Mobile a même choisi Alcatel-Lucent pour une partie de son réseau. Par ailleurs, les autres opérateurs font appel aux équipementiers chinois depuis plusieurs années, bien avant l’arrivée de Free Mobile. »

Sur les plans sociaux, le ministre a peut-être tiré trop vite car cette affirmation reste à démontrer. Lors d’une enquête réalisée en juillet dernier par notre confrère et partenaire Micro-Hebdo (n°741 du 12-25 juillet 2012), l’Arcep atténue la responsabilité de Free dans les plans sociaux de SFR et Bougues. De plus, selon Bernard Allain, secrétaire fédéral national de Force ouvrière (branche télécoms), « la tendance des réduction d’effectifs et à la délocalisation des centres d’appels est bien antérieure à l’arrivée de Free Mobile ».

Enfin, pour le ministre, les « Français sont, sur certains produits, prêts à payer plus cher. » Parle-t-il vraiment des forfaits mobiles ? Parce que sur ce point, le doute est plus que permis. D’autant qu’en début d’année, Arnaud Montebourg avait accueilli Free Mobile sans réserve avec un tweet dans lequel il affirmait que : « Xavier Niel vient de faire avec son nouveau forfait plus pour le pouvoir d’achat des Français que Nicolas Sarkozy en cinq ans. » Faut-il en déduire que le pouvoir d’achat n’est plus compatible avec la compétitivité des entreprises françaises ?

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Pascal Samama et Frédéric Bergé